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En entrant dans ce ravin, ce bruit résonne si fort que nous ressentons comme un sourd bourdonnement ; l’on est saisi d’un sentiment qu’on ne peut définir ; il nous semble que le pouls bat plus vite et que le sang bouillonne dans nos veines.

Le chemin longe ce torrent à une assez grande hauteur ; à quelques endroits, il est à peine assez large pour laisser passer les voitures ; alors les animaux, effrayés, n’osent avancer. Le moindre cri se répète pendant plusieurs minutes. Un coup de pistolet, tiré par un des hommes de l’arrière-garde, pour en connaître l’effet, parut comme un coup de canon aux gens de notre caravane, qui crurent que la montagne s’écroulait.

Gustave et ses amis, en avant comme d’habitude, chevauchaient depuis près de trois heures, lorsqu’ils aperçurent une écluse qui leur barrait le passage.

Cette écluse était faite avec de gros arbres couchés et superposés à une dixaine de pieds de hauteur ; de grosses pierres entouraient ces arbres, et le tout était rempli de branches et de terre. Une porte, laissant passer l’eau du torrent, avait été placée au milieu, de manière à pouvoir être baissée ou levée au besoin.

— Que veut-on faire d’une écluse dans ce ravin ? dit Gustave.

— Voudrait-on nous noyer, par hasard ? dit George.

— Il ne suffirait en effet que de baisser cette porte, pour couvrir ce chemin d’une épaisseur de dix pieds d’eau en cinq… Mais il est interrompu par une voix forte qui leur dit :

— Halte ! ou donnez le mot d’ordre.

Gustave et ses compagnons, surpris, arrêtent leurs chevaux et tirent leurs pistolets. Ils regardent dans la direction d’où venait cette voix, et voient une sentinelle, la carabine en joue, qui répète :

— Halte ! ou donnez le mot d’ordre.

Gustave répond avec les plus grand sang-froid et en souriant :