Page:Thomas - Gustave ou Un héros Canadien, 1901.djvu/236

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
236
gustave

verts de charbons ardents ; puis il vous arrachera la langue pour vous punir de vos mensonges et de votre perfidie, et pendra vos corps noirs et calcinés le long de la route pour servir d’exemple à ceux de vos frères qui voudraient faire comme vous.

Pendant qu’il parlait ainsi, on voyait frémir les prisonniers.

— Qui nous empêcherait de vous torturer ainsi ? ajouta-t-il ; mais nous aimons le Grand-Esprit, et nous essayons de l’écouter.

Tirant alors son crucifix d’argent, qui ne l’avait pas quitté depuis son départ de Montréal, il fait signe aux prisonniers d’avancer plus près, et leur dit :

— Avant de vous remettre entre les mains de notre chef, vous allez tous renouveler le serment que vous venez de faire, en mettant votre main droite sur ce crucifix ; vous l’embrasserez ensuite avec respect ; prenez bien garde que le mensonge soit sur vos lèvres, et de jurer une chose en pensant à une autre. Ce crucifix représente le Fils de Dieu, le Grand-Esprit ; si vous l’embrassez avec de mauvaises intentions dans vos cœurs, il le saura et vous punira sur-le-champ. Approchez un à un et chacun à votre tour.

Les sauvages, remplis de frayeur en voyant ce crucifix, n’osent approcher. Les objets de notre culte ont toujours été regardés par les sauvages comme mystérieux et sacrés.

— Approchez, répète Gustave, ce crucifix ne vous fera pas de mal, si vous dites la vérité.

Les sauvages s’approchent en témoignant beaucoup de respect. Les trois chefs d’abord, puis les autres prisonniers viennent tour à tour poser la main droite sur le crucifix, le baiser et jurer de ne jamais reparaître sur le chemin de la caravane.

Les hommes, femmes et enfants, témoins de cette cérémonie si solennelle, vu le lieu et la circonstance, gardent le plus profond silence ; plusieurs même portent les mains à leurs paupières humides.