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Gustave parvient à se cramponner à un pilier et se relève en appelant sa sœur de toutes ses forces ; mais sa voix se perd dans le tumulte causé par les cris des passagers qui, pâles d’effroi, s’étaient jetés pêle-mêle dans le salon.

Tous, hommes, femmes et enfants, étaient là se heurtant les uns les autres et s’écriant avec épouvante : Nous sommes perdus !… Où sont nos enfants ? Papa, maman, ou êtes vous ?

Cette panique dura plusieurs minutes, et aurait pu être la cause d’accidents graves, si le capitaine, entrant au salon, ne leur eût crié d’une voix forte :

— Ce n’est rien, calmez-vous, le vapeur n’a reçu aucune avarie pour le mettre en danger, il vient de reprendre sa route.

C’en fut assez, chacun s’empressa de rentrer dans sa cabine et le calme était revenu à bord.

Le soir arrivé, les groupes se formèrent de nouveau. M. Dumont, voulant se venger de la défaite du soir précédent, fit asseoir Gustave à côté de lui. Le prêtre, voyant que son jeune ami allait être en butte à de nouvelles attaques, s’approcha pour lui prêter main-forte au besoin.

— Je suis bien aise de vous voir, lui dit M. Dumont en lui offrant un siège ; veuillez vous asseoir, et si vous n’avez pas d’objection, nous parlerons ce soir de cette tradition dont parle tant l’Eglise de Rome ; vous n’ignorez pas, sans doute, que nous, protestants, rejetons toute tradition comme contraire aux préceptes de l’Évangile.

— Pourquoi donc, s’il vous plaît ?

— La tradition est contraire à l’Évangile, premièrement, parce que Jésus-Christ a dit : Lisez les Écritures, c’est en elles que vous trouverez la vérité et la vie. Or, quelles sont ces Écritures, sinon la Bible ? Secondement, parce que tout ce que ce divin Sauveur a fait, et tout ce que ses Apôtres ont enseigné, se trouve dans cette même Bible. Ainsi, qu’avons-nous besoin de tradition ?