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prématurée après la 4e, par la dissonance de la muette qui termine le premier membre et de la longue qui commence le second. Le second membre allonge l’arrêt même en rêverie immobile, et le dernier par la rime le clôt de deux mains frêles d’où choient légèrement des pétales.

II. — 6-6. Grandes orgues de l’alexandrin classique, qui étend la nappe idéale d’un bassin, d’une eau plane où monte seul le jet d’eau de la rime.

III. — 4-4-4. Trois pétales de lys qui tombent.

IV. — 6-6. Long vers assombri, aggravé d’assonance et d’allitération, qui disent une chute impassible et lente dans l’obscurité.

Sous la lourde prison de pierres et de fer
Où de mes vieux lions traînent les siècles fauves.

Sa facture (coupe, assonance, allitération) est identique à celle du premier de ces deux, sept vers plus haut, et il en rappelle le motif.

V. — 2-7-3 (ou, si l’on veut, 3-7-3 d’un vers de treize syllabes). La césure médiane annulée en fait par les deux césures latérales. La chute des fleurs symboliques est rendue par les deux membres extrêmes. Et voici dans les sept syllabes centrales le milieu de rêverie où sous les yeux des lions les pétales tombent, suspendus, arrêtés un instant comme l’indique la longueur de ce membre moyen. L’assonance de descendre et de silence, au début et à la fin, n’est-ce pas la même feuille de lys glissant, syllabe blanche qui se retrouve après avoir, disparaissant, traversé la rêverie d’Hérodiade ?

VI. — 3-3-6, la césure marquée par la virgule demeurant capitale. Elle paraît, cette césure, le mufle même de lion qui écarte la robe tombant en neuf syllabes avec une majesté hiératique et roide, sous les pierreries musicales des accents.