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Sinon d’êpandre pour baume antique le temps

(Id.)

Le premier est nettement trimère, sans césure secondaire à l’hémistiche. L’accent supplémentaire crée une impression de détail et de minutie qui est d’accord avec le sens du vers. Le second vers continue dans le sonnet, à une autre place, l’impression du premier, celle d’un mouvement méticuleux et ralenti. Il est d’ailleurs plus difficile à accentuer, et je n’en défendrai pas le rythme.

Le vers suivant appartient à un ordre analogue :

Se traîner le soleil jaune d’un long rayon

(Soupir.)

Ses accents lui donnent son effet saisissant. Il y en a le nombre ordinaire, quatre, sur la troisième, la septième, la dixième et la dernière. Mais si ce sont là les accents forts, sur les autres syllabes demeurent des accents secondaires qui prolongent, qui étirent le vers, comme ce long rayon même de soleil automnal, rendu solide et plastique. Les fortes assonances du dernier quart syllabique équilibrent presque, par leur densité, le développement en longueur des trois premiers quarts, de sorte que si ce quart syllabique n’est pas tout à fait une moitié rythmique, du moins il ne s’en faut guère.

Je passe à l’alexandrin qui comporte un nombre d’accents inférieur à la normale, c’est-à-dire trois, puisqu’il ne peut descendre au-dessous.

Des calices
De mes robes, arôme aux farouches délices,
Sortirait le frisson blanc de ma nudité

(Hérodiade.)

L’accent placé, avec la césure, sur la septième syllabe — blanc — fait tomber, à l’hémistiche, celui de la sixième[1]. Il ne reste que trois accents, et il semble à

  1. Pour la commodité du lecteur et pour abréger, je me con-