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Quand Flaubert dit que l’art ne doit pas conclure, et qu’il se défend lui-même de conclure, tout cela est bon en théorie, mais la vie apporte toujours une conclusion. Vivre, c’est conclure. Le dernier mot de l’Éducation sentimentale est une conclusion négative : il n’y a rien. Mais le dernier mot de Madame Bovary nous place en pleine réalité positive, nous met en accord avec un rythme de la nature et de la société. On ne pourrait pas écrire une suite à l’Éducation sentimentale, mais on en écrirait à Madame Bovary une pareille à celle que Renan a écrite pour la Tempête. Homais a, mieux encore que Caliban, de quoi faire un ordre social acceptable. Il l’a fait d’ailleurs : in illo vivimus, movemur et sumus. Et je sais bien que ni à droite ni à gauche on ne sera content de cette remarque. Mais c’est que ni à droite ni à gauche on n’a été content de Madame Bovary.