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m’auisay de mettre la teste hors pour la contempler, ie la vei, tant qu’il fut possible etendre ma veue, toute couuerte d’herbes[1], et fleurs par certains endroits, les herbes presques semblables à noz geneures : qui me donna incontinent à penser que nous fussions pres de terre, consideré aussi qu’en autre endroit de la mer ie n’en auois autât veu, toutefois ie me côgnuz incontinent frustré de mon opinion, entendant qu’elles procedoient de la mer : et ainsi la vimes nous semée de ces herbes bien l’espace de quinze à vingt iournées. La mer en cest endroit ne porte gueres de poisson, car ces lieux semblent plus estre quelques marecages qu’autrement. Estoile à queue. Incontinent apres nous apparut autre signe et presage, d’une estoille à queue, de Leuant au Septentrion : lesquels presages ie remets aux astrologues, et à l’experience que chacun peut auoir congnue. Apres (ce qui est encore pis) fumes agitez l’espace de neuf iours d’un vent fort contraire, iusques à la hauteur de nostre Floride. Situation de la Floride. Ce lieu est une pointe de terre entrant en pleine mer bien cent lieues, vingt-cinq lieues en quarré, vingt-cinq degrez et demy deça la ligne, et cent lieues du cap de Baxa qui est pres de là. Lors ceste grande terre de la Floride[2] est fort dangereuse à ceux qui nauigent du costé de Catay, Canibalu, Panuco, et Themistitan : car à la voir de loin on estimerait que ce fut une isle située en pleine mer. D’auantage est ce lieu dangereux à cause des

  1. Il s’agit de la mer des Sargasses. Voir Bulletin de la Société de Géographie. Décembre 1872.
  2. Il s’agit ici uniquement de la presqu’île de Floride terminée par le cap Sable ou Agi.