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mesmes m’ont recité. M. de l’Espiné. Capitaine Mogneuille.Pareillement ie ne l’eusse encore creu, iusques à ce qu’un capitaine de Normandie nommé De l’Espiné, et le capitaine Mogneuille, natif de Picardie, se promenas quelque iour en des bois de haute fustaye, tirerent un coup d’arquebuze contre deux de ces bestes qui estoient au feste d’un arbre, dont tomberent toutes deux à terre, l’une fort blessée, et l’autre seulemêt estourdie, de laquelle me fut fait present. En la gardant bien l’espace de vingt six iours, où ie congnu que iamais ne voulut manger ne boire : mais tousiours à un mesme estat, laquelle à la fin fut estrâglée par quelques chiês qu’auions mené auec nous par delà. Aucuns estimêt ceste beste viure seulement des fueilles de certain arbre, nommé en leur langue Amahut. Cest arbre est haut eleué sur tous autres de ce païs, ses fueilles fort petites et deliées. Et pource que coustumierement elle est en cet arbre ils l’ont appellé Haüt. Au surplus fort amoureux de l’homme quand elle est appriuoisée, ne cherchant qu’à môter sur ses espaules, comme si son naturel estoit d’appeter tousiours choses hautes, ce que malaisément peuuent endurer les Sauuages, pource qu’ils sont nuds, et que cest animant a les ongles fort agües, et plus longues que le lion, ne beste que i’aye veu tant farouche et grande soit-elle. Chamaleon.A ce propos, i’ay veu par experience certains Chameleôs, que lon tenoit en cage dans Constâtinople, qui furêt apperceuz viure seulemêt de l’air. Et par ainsi ie congneu estre veritable, ce que m’auoiêt dit les Sauuages de ceste beste. En outre encore qu’elle demeurast attachée iour et nuict dehors au vent et à la pluye (car ce pais y est