Page:Thevet - La France antarctique - Gaffarel, 1878.djvu/334

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rares quant à nous et incongnûes, i’espere qu’il ne sera pris en mauuaise part, mais au contraire pourra apporter quelque contentement au lecteur, amateur des choses rares et singulieres, lesquelles nature n’a voulu estre communes à chacun païs. Ceste beste pour abreger, est autant difforme qu’il est possible et quasi incroyable à ceux qui ne l’auroient veue. Ils la nomment Haû[1], ou Haûthi, de la grandeur d’un bien grand guenon d’Afrique, son ventre est fort aualé contre terre. Description d’un animal nommé Haüthi Elle a la teste presque semblable à celle d’un enfant, et la face semblablement, comme pouuez voir par la sequente figure retirée du naturel. Estant prise, elle fait des souspirs comme un enfant affligé de douleur. Sa peau est cendrée et velue comme celle d’un petit ours. Elle ne porte sinô trois ongles aux pieds longs de quatre doigts, faits en mode de grosses arestes de carpe, auec lesquelles elle grimpe aux arbres où elle demeure plus qu’en terre. Sa queue est longue de trois doigts, ayant bien peu de poil. Une autre chose digne de memoire, c’est que ceste beste n’a iamais esté veue manger d’homme viuant, encores que les Sauuages en ayent tenu longue espace de temps, pour voir si elle mangerait, ainsi qu’eux

  1. L’haû est l’ ou paresseux. Gandavo le décrit sous le nom de pergniça (P. 74.) : « Il marche si lentement que pendant quinze jours il n’avance pas de la distance d’un jet de pierre. Il lui faut deux jours pour monter sur un arbre et autant pour en descendre. » Cf. Léry § x. Les savants modernes ont fait justice des exagérations des premiers observateurs. Cf. Mémoire de Quoy et Guaymard dans le Voyage autour du Monde par Freycinet.