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été le témoin, pour les événements auxquels il n’a pas pris part, il se contente trop aisément de ce qu’on veut bien lui raconter. De là des contes à dormir debout ou même des absurdités qui déparent son œuvre. On connaissait tellement sa crédulité qu’on l’exploitait. Le grave De Thou[1] ne raconte-t-il pas qu’étant un jour, « pour se divertir, allé voir Thevet avec quelques-uns de ses amis, gens habiles et d’un esprit fin, ces derniers lui firent accroire, en sa présence, des choses absurdes et ridicules, que même des enfants auraient eu de la peine à croire. »

Nous reprocherons également à Thevet la composition bizarre de son ouvrage. Son plan est bien de décrire les pays au fur et à mesure qu’il les visite, mais à peine un nom propre se présente-t-il à lui qui éveille ses souvenirs, aussitôt il se lance dans une digression qui n’est pas toujours fort heureuse, et à laquelle néanmoins il trouve tant de charmes qu’il la recommencera quelques chapitres plus loin. C’est ainsi qu’il parle à diverses reprises des Antipodes, de l’Equateur, du cap de Bonne-Espérance. A la longue, ce manque de méthode impatiente et ces digressions perpétuelles, fatiguent l’attention.

Que dire enfin de son style ? La langue du XVIe siècle est si franche d’allures, si pittoresque avec son

  1. De Thou. Histoire de France. Liv. xvi.