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assis sur la terre, sinon quelques uns entre les autres, qui en contemplation de quelque preeminence, soit par lignée ou d’ailleurs, seront lors assis en leurs licts[1], ce que considerant, me vint en memoire ceste louable coustume des gouuerneurs de Thebes, ancienne ville de la Grece : lesquels pour deliberer ensemble de la Republique estoyent tousiours assis sur la terre. Laquelle façon de faire l’on estime un argument de prudence : car l’on tient pour certain selon les philosophes, que le corps assis et à repos, les esprits sont plus prudens et plus libres, pour n’estre tant occupez vers le corps quand il repose, que autrement.

Dauantage une chose[2] estrange est que ces Ameriques ne font iamais entre eux aucune treue, ne paction, quelque inimitié qu’il y ait, comme font toutes autres nations, mesmes entre les plus cruels et barbares, comme Turcs, Mores et Arabes : et pense que si Thesée premier auteur des treues entre les Grecs y estoit, il seroit plus empesché qu’il ne fut cru. Ils ont quelques ruses de guerre pour surprendre l’un l’autre, aussi bien que l’on peut auoir en autres lieux. Donc ces Ameriques ayans inimitié perpetuelle, et de tout temps contre leurs voisins sus-

  1. Léry. § xiv. « Eux se promenans, ou estans assis dans leurs lits de cotton pendus en l’air, exhortent les autres. »
  2. Léry. « Si tost que la guerre est une fois declairée entre quelques unes de ces nations, tous allégans qu’attendu que l’ennemy qui a reçu l’iniure s’en ressentira à iamais, c’est trop laschement fait de le laisser eschapper quand on le tient à merci ; leurs haines sont tellement inuétérées, qu’ils demeurent perpétuellement irréconciliables. »