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deuxiesme de Nouembre, que nous entrasmes en un lieu nômé Maqueh[1], pour nous enquérir des choses specialemêt de l’armée du Roy de Portugal. Auquel lieu nos esquifs dressés, pour mettre pied en terre, se présentèrent seulement quatre vieillards de ces sauuages du païs, pour ce que lors les ieunes estoient en guerre, lesquels de prime face nous fuyoient, estimans que ce fussent Portugais, leurs ennemys : mais on leur donna tel signe d’asseurance, qu’à la fin s’approchèrent de nous. Toutefois ayans là seiourné vingt quatre heures seulement, feimes voile pour tirer au cap de Frie[2], distant de Maqueh vint cinq lieues. Ce pais est merueilleusement beau, autrefois decouuert et habité par les Portugais, lesquels y auoient donné ce nom qui estoit parauant Gechay, et basti quelque fort, esperans là faire résidence, pour l’aménité du lieu. Mais peu de temps après, pour ie ne sçay quelles causes, les Sauuages du pais les firent mourir, et les mangèrent comme ils font coustumierement leurs ennemys. Coustumes de Sauuages de manger leurs enemys. Et qu’ainsi soit, lors que nous y arriuasmes ils tenoyent deux pauures Portugais, qu’ils auoient pris dans une petite caraueille, ausquels ils se deliberoyent faire semblable party, que aux autres, mesmes à sept de leurs compagnons de récente memoire : dont leur vint bien à propos nostre arriuée, lesquels par grande pitié[3] furent par nous rachetez,

  1. Ce lieu se nomme aujourd’hui Macaheh.
  2. Ce cap a conservé son nom, cabo Frio.
  3. D’ordinaire les Français se montraient moins tendres envers les Portugais prisonniers des Brésiliens. H. Staden. (Ouv. cité.