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correspondances « ou de ces « affinités » que le poète a lui-même indiquées dans le vers célèbre :

Les formes, les contours et les sons se répondent.

Assurément, c’étaient la des nouveautés fécondes, des nouveautés durables ; et comme il ne semblait pas qu’elles eussent rien d’incompatible avec les leçons du « Parnasse, » on écoutait d’une part avec docilité le haut enseignement de Leconte de Lisle, et de l’autre on lisait comme en cachette, avec délices, les vers de Charles Baudelaire.

Je me souviens à ce propos qu’il y a de cela vingt-cinq ans, j’avais essayé, dans un article de la Revue des Deux Mondes, de caractériser cette influence de Baudelaire sur M. François Coppée, sur M. Sully-Prudhomme, sur M. Paul Bourget, dont les premiers vers venaient de paraître, 1875, et sur quelques autres. François Buloz, qui vivait encore, en fut exaspéré, quoiqu’il eut jadis imprime dans la Revue les premiers vers de Baudelaire. « Mais Baudelaire est donc un maître pour vous ? » s’écriait-il. Et j’avais beau lui répondre : « Non ! mais il en est un pour eux, » je ne réussissais pas à le convaincre. Je ne croyais pas, au surplus, si bien dire, et je n’avais pas prévu que le moment était proche ou toute une génération n’allait plus jurer, comme l’on dit, que par l’auteur des Fleurs du Mal. C’est la génération de Paul Verlaine et de Stéphane Mallarmé.

Tout en continuant en effet de subir la discipline parnassienne, on commençait, tant en vers qu’en prose, à la trouver alors un peu dure. En dépit du vers Ut pictura poesis, on commençait à trouver que la poésie périssait, en quelque manière, sous cette perfection d’exécution. Ces contours si précis, ces vers si pleins, ces « représentations » si fidèles, et, dans leur fidélité, si complètes, gênaient, embarrassaient, comprimaient la liberté de l’imagination et du rêve. On ne pouvait pas échapper à l’artiste, et quand il vous tenait, il ne vous lâchait plus. Point d’arrière-plan, de lointaines perspectives ; rien de ce vague ni de cette obscurité de ce clair obscur, pour mieux dire, qui est bien cependant une part de la poésie. A moins que ce ne soit dans quelques pièces de M. Sully-