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— Messieurs, la Reine ! fit-il.

Et redressant la tête comme un cheval qui entend la trompette, Dingley, suivant l’usage, répondit :

— La Reine, Dieu la garde !

La plupart des officiers réunis à cette table venaient de faire colonne. Demain ils reprendraient le Veld. Après les conserves rancies et les boissons chauffées par le soleil, ils jouissaient pleinement de ce dîner confortable, comme d’une heureuse aubaine, et se délectaient du Champagne, de la glace et du porto. Beaucoup, déjà, avaient terriblement bu. Les anecdotes se succédaient, innombrables, absurdes. La conversation devenait un sport, une mêlée où la victoire était réservée à la plus énorme sottise. Au milieu de ce fatras, un détail, un trait, un mot expressif que Dingley enregistrait dans sa mémoire, sans joie, par habitude. Mais que lui importait la guerre, et tous les mots, et tous les gestes, et tous les visages de ces hommes occupés à manger et à boire ; et cette usine abandonnée à quelques milles de