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tait plus qu’il n’en avait fait pour elle depuis plusieurs mois. George avait déposé son air triste et semblait maintenant tout radieux.

« À votre tour, William, » dit-il tout joyeux en frappant sur l’épaule de Dobbin.

Et Dobbin s’en alla embrasser Amélia sur la joue.

On alla ensuite à la sacristie pour signer le registre.

« Dieu vous bénisse, mon vieux Dobbin ! » dit George en lui serrant la main, la vue presque troublée par les larmes.

William répondit par un mouvement de tête. Son cœur était trop ému pour lui permettre d’en dire plus long.

« Écrivez-nous régulièrement, et venez aussitôt que possible, n’est-ce pas, mon ami ? » dit Osborne.

Après des adieux très-pathétiques qui eurent lieu entre mistress Sedley et sa fille, le nouveau couple monta dans la voiture.

« Gare là ! petits polissons, » cria George à une troupe de gamins tout trempés de pluie qui stationnaient devant la porte de l’église.

L’averse cinglait sur la figure des deux époux, rien que pour monter dans la voiture ; les rubans des postillons se collaient sur leur veste ruisselante. La troupe d’enfants poussa des hurlements diaboliques au moment où la voiture s’éloigna en les éclaboussant.

William Dobbin, de la porte de l’église, les regardait disparaître avec une expression singulière dans le regard ; la petite troupe de curieux riait de son air bizarre ; mais il se souciait bien des curieux et de leur rire !

« Allons manger un morceau, Dobbin, » lui cria une voix par derrière.

En même temps une main pesante s’abaissant sur son épaule coupait court aux rêveries du pauvre garçon ; mais le capitaine ne se sentait pas le cœur à se rendre aux provocations gastronomiques de Joe Sedley. Il installa dans la voiture la vieille dame tout éplorée, vit Joe monter à côté d’elle et les domestiques sur le siége, puis les quitta sans leur faire de bien longs adieux ; cette seconde voiture disparut comme la première, et les gamins la poursuivirent encore de leurs cris railleurs.

« Voilà pour vous, petits mendiants, » dit Dobbin en leur je-