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pris la fuite ; ainsi le veulent tous ceux qui refusent de comprendre quel est le sens de cet oracle de notre Seigneur, pour en faire un rempart qui défende leur pusillanimité, puisque ce précepte est assujetti à des conditions de personnes, de temps et de causes. « Lorsque l’on commencera de vous persécuter, dit-il, fuyez de ville en ville. » Nous soutenons que ce précepte s’adressait personnellement aux Apôtres, ainsi qu’aux lieux et aux circonstances dans lesquels ils vivaient, comme le démontreront les textes précédents et suivants, qui ne conviennent qu’aux Apôtres : « N’allez point vers les nations, et n’entrez pas dans la ville des Samaritains ; mais allez plutôt vers les brebis perdues d’Israël. » Pour nous, la voie des nations nous est ouverte, puisque le Seigneur nous y a trouvés et que nous y marchons encore ; point de ville qui nous soit fermée, puisque nous prêchons par tout l’univers. Aucun soin particulier pour Israël ne nous est recommandé, sinon que nous devons évangéliser toutes les nations. De plus, si nous sommes saisis par les persécuteurs, ce n’est pas devant l’assemblée des Juifs que nous serons conduits, ni dans leurs synagogues que nous serons battus de verges ; c’est aux puissances et aux tribunaux de Rome que nous serons livrés. Ainsi le précepte de fuir regardait spécialement les Apôtres, parce qu’il fallait d’abord prêcher devant les brebis perdues de la maison d’Israël. Il était nécessaire que la prédication s’accomplît là où elle devait s’accomplir en premier lieu, afin que « le pain de la parole fût distribué aux enfants de la maison avant les animaux immondes. » Voilà pourquoi le Seigneur ordonne à ses Apôtres de fuir pour un temps, non pas pour leur apprendre à se dérober à la persécution en elle-même (car il leur prédit qu’ils souffriraient des persécutions, et il leur enseignait à les supporter), mais dans le but de propager la doctrine, de peur que s’ils eussent été mis à mort sur-le-champ, l’Evangile ne fut étouffé à son berceau.