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TERTULLIEN.


seconds, parce que « nous ne pouvons nous asseoir en même temps à la table du Seigneur et à la table des démons. » Si donc nous préservons notre bouche et notre estomac de ces souillures, quel motif plus impérieux encore d’éloigner nos yeux et nos oreilles, organes plus augustes, de tout plaisir impur consacré aux morts ou aux idoles, aliment qui ne va pas se perdre dans l’estomac, mais que digèrent l’âme et l’esprit. Or, la pureté de l’esprit et de l’âme est plus agréable aux regards de Dieu que celle du corps.

XIV. Maintenant, quoiqu’il soit établi que l’idolâtrie est le fond de tous les spectacles, motif qu’il suffisait d’exposer pour nous engager à y renoncer, prouvons-le comme par surcroît, à cause de ceux qui se prévalent de ce qu’aucun texte formel ne défend d’assister aux spectacles, comme si la loi gardait le silence, « dès qu’elle nous interdit toutes les convoitises du siècle. » En effet, de même que l’argent, la bonne chère, les honneurs, les voluptés charnelles et l’ambition, le plaisir a aussi sa convoitise : or, les spectacles sont une espèce de plaisir. Les convoitises, à mon jugement, prises en général, renferment en soi les plaisirs ; de même les plaisirs, entendus dans une signification générale, comprennent les spectacles. Au reste, en parlant plus haut de la nature de ces lieux, nous avons dit qu’ils ne souillent pas par eux-mêmes, mais par les choses qui s’y passent : ils boivent le poison de l’infamie, et le répandent sur les spectateurs.

XV. L’idolâtrie, nous l’avons démontré, est le principal motif qui condamne ces spectacles : prouvons que tout ce dont ils se composent est contraire aux préceptes de Dieu. Dieu nous recommande d’accueillir avec la tranquillité, la douceur et le calme de la paix, l’Esprit saint, qui de sa nature « est tendre et doux ; » il nous défend de le contrister par la fureur, la colère, la vengeance et la douleur : comment pourra-t-il s’accommoder des spectacles, qui ne vont jamais sans le trouble de l’âme ? Là où il y a