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mêmes dont on les accuse d’offenser la majesté ? Il y a plus, vous y trouverez cette loi formelle, explicite : « Priez pour les rois, pour les princes, pour les puissances de la terre, afin que vous jouissiez d’une paix parfaite[1]. » En effet, que l’empire s’ébranle, tous ses membres s’ébranlent avec lui ; et nous-mêmes, bien que la multitude nous regarde comme des étrangers, nous nous trouvons nécessairement enveloppés dans ses désastres.

XXXII. D’ailleurs, une raison non moins décisive nous fait une loi de prier pour le salut des empereurs et pour les prospérités de Rome. Ignorons-nous que la dernière catastrophe qui menace l’univers, la clôture suprême du temps avec toutes les calamités qu’elle amènera, n’est suspendue que par le cours de l’empire romain ? Demander à Dieu d’ajourner ce lamentable événement, c’est lui demander la prolongation de l’empire. Si nous ne jurons point par le génie des Césars, nous jurons par leur vie, plus auguste que tous les génies qui ne sont que des démons. Nous respectons dans les empereurs les conseils de la Providence qui les a établis chefs des nations. Ils n’ont de pouvoir, nous le savons, que celui que Dieu leur a transmis. Nous lui demandons la conservation d’un être qu’il a lui-même voulu : et c’est là pour nous un grand serment. Quant aux génies, nous les conjurons pour lés chasser des corps qu’ils obsèdent. Mais nous préserve le ciel de jurer par eux, et de leur déférer ainsi un honneur qui n’appartient qu’au Dieu véritable !

XXXIII. Mais pourquoi parler davantage du religieux, sentiment et de la piété chrétienne qui nous lie à l’empereur ? Pourrions-nous y manquer envers l’élu de notre Dieu ? A ce titre, je le dirai hardiment : César est à nous plus qu’à personne, puisque c’est notre Dieu qui l’a établi ce qu’il est. Je suis donc à même plus qu’un autre de contribuer à sa conservation, non-seulement parce que je la demande

  1. Rom. xiii. — I Timoth. 11.