Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 2.djvu/263

Cette page n’a pas encore été corrigée

qui s’empresse d’absoudre un coupable ? Il sait qu’il ne lui est pas permis de le vouloir : aussi n’entreprend-il jamais de le contraindre à nier pour le trouver innocent. Et un Chrétien, coupable, selon vous, de tous les crimes, l’ennemi des dieux et des empereurs, des lois et des mœurs, l’ennemi, en un mot, de toute la nature, vous le forcez à nier afin de pouvoir l’absoudre. Manifeste prévarication ! vous voulez qu’il nie ce qui constitue son crime, pour le déclarer innocent malgré lui, et le décharger du passé. Quel étrange aveuglement de ne pas reconnaître qu’il faut en croire plutôt à des déclarations spontanées qu’à des désaveux arrachés par la violence ! Quelle foi méritent des désaveux auxquels manqua la liberté ? Et ne craignez-vous pas que ce Chrétien, renvoyé absous pour avoir menti à sa conscience, ne se moque de vous, et ne redevienne de nouveau Chrétien ?

Puisque vous établissez ces différences entre nous et les autres coupables, puisque vous n’exigez de nous qu’une seule chose, la répudiation du nom chrétien, nous y renonçons (quand nous nous permettons ce qui est défendu aux Chrétiens), il résulte clairement que nous n’avons à nous justifier d’aucun crime, qu’on n’a rien à nous imputer que notre nom qu’une rivalité de religion poursuit avec acharnement. Elle commence par vous empêcher d’approfondir ce que vous êtes certains d’ignorer : aussi l’on croit sur notre compte ce qui n’a jamais été prouvé. On s’abstient de recherches, de peur de trouver des preuves du contraire ; on nourrit complaisamment de jaloux préjugés, afin de pouvoir, sans autre argument, sur notre simple confession, condamner un nom odieux. Nous confessons, on nous torture ! nous persévérons, on nous livre au supplice ! commençons-nous à nier, on nous absout ! On ne fait la guerre qu’à un nom.

Enfin pourquoi, dans vos arrêts de mort, ne nous condamnez-vous que comme Chrétiens, et non comme homicides, comme incestueux, comme coupables, en un mot, de