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a la mauvaise habitude de dire me Hercle ! me dius fidius ! parce que la plupart ignorent que c’est jurer par Hercule. Or, jurer avec imprécation par ceux que tu as abjurés, qu’est-ce autre chose que prévariquer contre la foi avec idolâtrie ? Peut-on jurer par les dieux sans les honorer ?

XXI. Tu pèches par pusillanimité, lorsqu’un étranger te lie par quelque formule de serment ou de témoignage, et que tu gardes le silence, pour ne pas être reconnu. Eu gardant le silence, tu confirmes la majesté de ceux au nom desquels tu parais engagé. Que tu confesses les dieux des nations par tes paroles ou par les paroles d’autrui ; que tu jures toi-même par les idoles ou que tu acquiesces au serment d’autrui, qu’importe ? Reconnaissons ici les es de Satan, qui travaille à nous faire prononcer par la bouche des siens ce qu’il ne peut nous faire prononcer à nous-mêmes, en introduisant l’idolâtrie dans notre cœur par les oreilles. A coup sûr, quiconque veut te lier, le fait avec une intention favorable ou hostile. Hostile ? le voilà provoqué au combat, et tu sais que tu dois lutter contre l’ennemi. Favorable ? Quelle occasion plus sûre de transporter sur le Seigneur ton engagement, afin de rompre le lien par lequel l’esprit malfaisant cherchait à t’enchaîner au culte des faux dieux, ou, en d’autres termes, à l’idolâtrie ! Toute condescendance de cette nature est une idolâtrie. Tu honores ceux au nom desquels tu as promis d’obéir.

Je connais un Chrétien (que Dieu lui pardonne !) qui se disputait en public. Son adversaire lui cria : Que Jupiter te perde ! -Qu’il te perde toi-même ! lui répondit-il. Je le demande, qu’eût fait de plus un païen qui aurait cru à la divinité de Jupiter ? Quand bien même il n’eût pas renvoyé à son antagoniste l’imprécation, en jurant par Jupiter ou par quelque autre, semblable à Jupiter, c’était reconnaître Jupiter pour dieu, que s’irriter de cette imprécation, en maudissant à son tour. Pourquoi, en effet, s’irriter