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nous d’être leurs frères suivant la nature, mais non suivant la superstition. Nous sommes leurs semblables par l’ame, mais non par la croyance ; nous vivons dans le même monde, mais non dans la même erreur. Que s’il nous est interdit de suivre les superstitions païennes avec les étrangers, combien il serait plus criminel de les suivre avec nos frères ! Qui pourrait avouer ou défendre une pareille transgression ? L’Esprit saint reproche aux Juifs leurs jours de fête : « Mon ame, s’écrie-t-il, a en horreur vos sabbats, vos néoménies et vos solennités. » Et nous, pour qui n’existent plus ces sabbats, ces néoménies, ces solennités que Dieu chérissait autrefois néanmoins, nous assistons aux fêtes de Saturne, de Janus, du solstice d’hiver, de la grande matrone ! nous échangeons des présents ! nous donnons et recevons des étrennes ! les jeux, les banquets retentissent pour nous ! O que la foi des gentils est bien plus conséquente ! Ils ne revendiquent aucune des solennités chrétiennes. Chez eux, point de jour de Seigneur, point de Pentecôte : quand même ils les connaîtraient, ils ne les célébreraient pas avec nous ; ils craindraient de paraître Chrétiens. Et nous, nous ne craignons pas qu’on ne nous prenne pour des païens ! Faut-il quelque condescendance pour la chair ? Vous avez, non pas un seul jour de fête, mais plus de fêtes même que les païens. En effet, la fête païenne ne revient qu’une fois l’an ; la vôtre revient tous les huitièmes jours. Comptez bien toutes les solennités idolâtriques : le nombre n’en saurait atteindre les cinquante jours de notre Pâque.

XV. « Que vos œuvres brillent, » dit l’Apôtre. Aujourd’hui ce sont nos maisons et nos portes qui brillent : on trouve en effet plus de portes de païens sans lanternes et sans lauriers, que l’on n’en trouve appartenant aux Chrétiens. Que vous semble encore de cette superstition ? S’agit-il d’un honneur rendu à une idole ? Assurément l’honneur rendu à une idole constitue l’idolâtrie. S’agit-il d’honorer un homme ? Rappelons-nous que toute idolâtrie a commencé