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eux plus qu’un prêtre, puisqu’ils te doivent d’avoir des prêtres. C’est ton industrie qui transforme en divinité un nom imposteur[1].

Tu n’adores pas les dieux que tu fais, me dis-tu ; mais ils ne te désavouent pas pour leur adorateur, ceux auxquels tu immoles la plus riche, la plus succulente, la plus illustre des victimes, la victime de ton salut !

VII. Un homme zélé pour la foi parlerait toute une journée sur cette matière, en gémissant de voir un chrétien quitter les idoles pour venir à l’église ; sortir des ateliers du démon pour entrer dans la maison de Dieu ; lever vers le Dieu créateur des mains qui viennent de créer des idoles ; adorer le Seigneur avec ces mêmes mains qui au dehors se font adorer elles-mêmes dans leurs œuvres ; approcher du corps de notre Seigneur des mains qui donnent des corps aux démons.

Le scandale serait moindre s’ils recevaient d’une main étrangère ce qu’ils souillent ; mais ils vont jusqu’à donner aux autres ce qu’ils ont souillé. Des faiseurs d’idoles ont été admis dans les ordres sacrés de l’Église. O crime ! Les Juifs n’ont trempé qu’une fois leurs mains dans le sang du Sauveur. Pour eux, ils déchirent son corps tous les jours. O mains sacrilèges, qu’il faudrait couper ! A ces impies de savoir maintenant si c’est par figure qu’il a été dit. « Si votre main est pour vous un sujet de scandale, coupez-la. » Et quelles mains méritent plus d’être coupées que celles qui chaque jour scandalisent le corps de Jésus-Christ[2].

VIII. Il est encore un grand nombre d’autres professions qui, sans toucher directement à la fabrication des idoles, n’en sont pas moins entachées du même crime, puisque sans elles les idoles ne peuvent rien. Qu’importe, en effet, que tu bâtisses ou que tu décores ; que tu élèves un temple, un

  1. Ou bien : Ton industrie est la divinité qui fait toute leur gloire.
  2. L’Église.