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coquillages. L’or de son dos est plus éblouissant que tous les clous d’or du monde ; sa queue balaie la terre plus pompeusement que la plus longue simarre ; mélange d’un nombre infini de couleurs, nuancée, chatoyante, sa parure, qui n’est jamais la même, semble toujours différente, quoiqu’elle soit toujours la même quand elle paraît différente : enfin elle change autant de fois qu’elle se remue. Il faut nommer aussi le serpent, quoique après le paon. En effet, il change la peau et l’âge qu’il tient de la nature. Aussitôt qu’il a pressenti la vieillesse, il s’enferme dans un passage étroit, y laisse une peau ridée en même temps qu’il s’y glisse, et dépouillé de lui-même dès l’entrée, ne sort de sa caverne que brillant et rajeuni. L’hyène, si tu l’observes bien, change de sexe tous les ans, une année mâle, l’autre année femelle. Je ne dis rien du cerf, qui, arbitre de son âge, n’a qu’à se repaître d’un serpent pour se renouveler, par ce poison et cette défaillance, dans l’éclat de sa première jeunesse.

Il se rencontre encore un humble quadrupède, à la démarche lente, à la peau rude, et qui habite les champs. C’est la tortue de Pacuvius ? diras-tu. Point du tout. Le vers de ce poète s’applique à un autre animal qui, pour être des plus petits, ne laisse pas d’avoir un grand nom. Qui entendra parler du caméléon, sans le connaître, s’imaginera que c’est au moins quelque lion formidable. Mais rencontre-le dans une vigne, caché tout entier sous un de ses pampres, alors tu riras de l’exagération de la Grèce dans ses dénominations. En effet, point de suc dans son corps, quoique des animaux beaucoup plus petits n’en manquent pas. Le caméléon n’est qu’une peau, cependant il vit ; sa petite tête tient immédiatement à son dos, car il n’a point de cou ; aussi ne se tourne-t-il qu’avec effort. Mais ses yeux, ou pour mieux dire, ses deux points de lumière, placés à fleur de tête, se portent rapidement à droite et à gauche, dans leur éblouissante mobilité. A peine peut-il s’élever de terre, tant il est pesant et fatigué, il ne marche qu’