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à Mammon, et de la retirer à Dieu ? Sera-ce « rendre à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu, » que de ne pas rendre à Dieu l’homme, sa créature, et d’enlever à César son denier ? La couronne triomphale se construit-elle avec des feuilles ou avec des cadavres ? est-elle ornée de métal ou de bûchers ? parfumée d’essences, ou arrosée des larmes des épouses et des mères, et peut-être même de quelques Chrétiens ; car le Christ habite aussi parmi les Barbares ? Porter sur sa tête cette ignominie, n’est-ce pas avoir combattu de sa propre main ?

Il est une autre milice destinée au service particulier des princes ; car on donne le nom de castrenses aux couronnes que les Césars distribuent à leurs gardes dans certaines solennités. Mais là encore, tu es le soldat et l’esclave d’un autre ; et si tu l’es de deux à la fois, de Dieu et de César, tu ne peux l’être de César, puisque tu te dois à Dieu, qui, si je ne me trompe, réclame la préférence, même là où la communauté est possible.

XIII. Dans certaines solennités publiques, les Ordres de l’État se couronnent de lauriers : les magistrats portent des couronnes d’or. On préfère même à celles-ci les étrusques. On désigne par ce nom certaines couronnes qui sont enrichies de pierreries et revêtues de feuilles de chêne d’or, célèbres à cause de Jupiter, et que l’on prend avec la robe brodée de palmes, pour conduire les chars sacrés. Il y a encore des couronnes d’or provinciales, mais destinées aux images plutôt qu’aux hommes, et qui réclament des têtes plus grandes. Mais tes ordres, à toi, tes magistrats, le nom même de ta cour, c’est l’Église du Christ. Tu es à lui, puisque tu « es inscrit sur le livre de vie. » Ta pourpre, à loi, c’est le sang du Seigneur ; ton laticlave, c’est sa croix : là « est la cognée mise à la racine de l’arbre ; là est le rejeton qui sort de la racine de Jessé. » Qu’importent les chevaux de l’État avec leurs couronnes ? Ton Seigneur, à toi, lorsqu’il « voulut entrer à Jérusalem, n’avait pas même un âne à lui. Que ceux-là se glorifient dans leurs