Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 1.djvu/420

Cette page n’a pas encore été corrigée

comment ils retournent dans le néant ; si leur commencement n’a pas été visible, leur fin ne l’est pas davantage. Toutefois ils furent des corps solides aussi longtemps qu’on put les voir. Ce qui est écrit ne peut pas n’avoir pas été.

IV. Ne pouvant rejeter la naissance charnelle d’un Dieu, soit parce qu’elle lui serait impossible, soit parce qu’elle mettrait en péril sa nature, il ne te reste plus que de la répudier et de la flétrir comme indigne d’un Dieu. Commençant par l’abjection de la naissance, déclame tant que tu voudras contre la bassesse des principes qui servent à la génération dans le sein maternel, contre ce hideux mélange de sang et d’humeurs ; contre cette chair qui doit se nourrir de cette même fange pendant neuf mois. Montre-nous cette grossesse qui augmente de jour en jour, pesante, incommode, troublée jusque pendant le sommeil, pleine d’incertitude par ses désirs ou ses dégoûts. N’épargne pas même la pudeur de la femme qui devient mère, honorable pour les périls qu’elle court, sainte et religieuse par ces fonctions de la nature. Tu as aussi horreur de. cet enfant jeté à terre avec les obstacles qui l’embarrassent, et les humeurs qui le souillent. Ces langes qui le retiennent, ces membres qu’on lave, ces caresses qui te semblent dérisoires, excitent ton dédain. Tu méprises, Marcion, ce respect dû à l’œuvre de la nature si digne cependant de notre vénération. Mais toi, comment es-tu né ? Tu hais l’homme qui vient au monde ! comment donc peux-tu aimer quelqu’un ? Certes, tu ne t’es pas aimé toi-même, quand tu t’es séparé de l’Église et de la foi du Christ. Mais à toi de savoir si tu le déplais a toi-même, ou si tu os né autrement.

Il n’en est pas moins vrai que cet homme conçu dans le sein de la femme, formé dans l’abjection, enfanté dans la honte, élevé parmi des caresses dérisoires, Jésus-Christ l’a aimé. C’est pour lui qu’il est descendu ; pour lui qu’il a prêché ; pour lui qu’il s’est anéanti jusqu’à la ; mort et à la mort de la Croix. Et à vrai dire, il l’a tendrement