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à travers les grandes eaux. » La mer brise-t-elle ses flots au bruit de sa menace ? Nahum est dégagé de son serment : « Il menace la mer, et elle est desséchée, » sans doute sous le souffle des aquilons qui la tourmentaient. Par quel côté veux-tu que j’établisse la vérité de mon Christ ? Par les exemples qui l’ont précédé, ou par les prophéties qui le concernent ? Courage donc ! Approche, toi pour qui mon Sauveur n’est qu’un guerrier véritable, avec une armure véritable, au lieu d’un conquérant spirituel, destiné à triompher des puissances spirituelles par des armes spirituelles, et dans des batailles spirituelles. Viens apprendre de la bouche de cette légion de démons, cachée dans un seul homme, ainsi qu’elle le déclare elle-même, que le Christ est le vainqueur des ennemis spirituels, que ses combats et ses armes sont les armes et les combats de l’esprit, conséquemment qu’à lui seul était réservé l’honneur de terrasser la légion infernale dans une guerre que le roi-prophète semble avoir entrevue, quand il s’écrie : « Le Seigneur est fort, il est puissant. C’est lui qui triomphe dans les combats. » Il a dit vrai. Le Christ se mesura avec la mort, son dernier ennemi, et l’enchaîna au trophée de sa croix.

Ce démon, surnommé Légion, le reconnut pour le Fils de Dieu ; mais de quel Dieu ? Indubitablement de ce Dieu dont ils connaissaient l’abîme et redoutaient les tourments. Il n’est pas vraisemblable qu’ils aient attribué la puissance à un Dieu récent et inconnu, parce qu’ils n’ont pu ignorer le Créateur. Admettons, si tu le veux, que Satan n’ait pas su autrefois qu’il y avait un Dieu au-dessus de sa tête ; alors qu’il le vit déployer sa puissance au-dessous du ciel où il résidait, il ne peut s’empêcher de le reconnaître. L’accablante vérité que le prince des ténèbres avait découverte s’était répandue jusqu’aux derniers rangs de sa famille sur la terre, et dans l’étendue de ce ciel où agissait la divinité étrangère. Si elle eût existé, le Créateur n’eût pas manqué de la connaître, lui et ses créatures. Elle n’existait pas ; donc