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ceux qui se sont endormis en Jésus-Christ sont morts sans espérance » pour ressusciter, mais en fantômes probablement, comme leur Christ.

IX. On nous oppose que les anges députés par le Créateur auprès d’Abraham et de Loth, se sont présentés à eux sous les apparences d’une chair fantastique, et, malgré cette illusion, n’ont pas laissé de parler, de manger, et d’exécuter les ordres qu’ils avaient reçus, comme s’ils eussent été des hommes réels.

A cela, que répondre ? D’abord nous défendons à Marcion de citer pour la défense de son dieu les exemples d’un Dieu qu’il diffame. Plus il exalte la bonté et la perfection de son idole, moins il lui conviendra de ressembler au Créateur, sur lequel elle ne peut avoir l’avantage de la perfection et de la bonté, sans se montrer complètement différente. Qu’il le sache bien ensuite. Nous sommes loin de lui accorder que les anges aient eu une chaire illusoire ; leur substance était aussi entière et aussi réelle que la nôtre. En effet, s’il ne fut pas plus difficile au Christ d’adapter à une chair illusoire des sens et des actes réels, il lui en coûta bien moins encore de donner à des affections et. à des actes véritables, une substance et des organes qui le fussent aussi, d’autant plus qu’il en était le véritable auteur. Que ton Dieu, inhabile à produire la réalité, s’en dédommage par des fantômes, je le comprends. Il n’a jamais produit de chair. Mais mon Dieu qui pétrit la boue, et la convertit eu cette substance sans l’union conjugale, boue devenue chair vivante, a pu bâtir pour ses anges une maison de chair, n’importe la matière dont il la façonna. N’est-ce pas lui qui créa de rien et d’un seul mot, ce monde, avec ses milliers de corps si merveilleux et si divers ?

D’ailleurs, si ton Dieu promet aux hommes de les revêtir un jour de la véritable substance angélique : « Et ils seront comme les anges dans le ciel ; » pourquoi le mien n’aura-t-il pas la faculté de communiquer à des anges la réalité de la substance humaine ? Où l’a-t-il prise ? La question