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LE JUIF

cevoir de l’impatience qu’elle causait à sa fille. À quoi tiennent donc ces attachemens subits et funestes qui saisissent le cœur à la vue d’un être dont on ignorait jusqu’alors l’existence, et le rendent en un instant l’arbitre de la destinée entière ? Dans les temps que je cite, on les attribuait aux prestiges du Démon ; et en effet, comment comprendre qu’une jeune fille sage, pieuse, modeste, accorde en un instant toutes ses affections à un étranger, ennemi de son Dieu, que sa foi lui faisait un devoir de mépriser, et sans qu’il ait (au moins en apparence) cherché à les obtenir ! C’était cela peut-être ? c’était le froid dédain du Juif qui subjuguait son cœur en l’étonnant ? Le fils de Nathan rendait aux chrétiens haine pour haine, mépris pour mépris ; et s’il leur faisait du bien chaque fois qu’il en trouvait l’occasion, c’est que son ame généreuse l’y portait sans doute, mais aussi parce qu’il était satisfait d’avoir sur