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I


Le soleil venait de s’éteindre dans l’océan, * et la nuit allait bientôt couvrir le monde de son manteau semé d’étoiles.

La mère, assise dans un coin de sa demeure, versait des torrents de larmes, * et essuyait ses yeux humides ;

Et loin, bien loin d’elle, * le fils pleurait aussi.

La distance séparait leurs corps ; * mais leurs cœurs étaient unis par une amère douleur.

Et les persécuteurs se réjouissaient : * ils entouraient leurs têtes de couronnes de fleurs, et leurs lèvres s’humectaient des vins les plus recherchés.

Ils chantaient ; * et leurs bouches infâmes proféraient ces paroles odieuses :

« Gémissez et pleurez, fils et mères ; * gémissez, tandis que nous sommes dans l’allégresse.

« Nous nous réjouissons des larmes de l’enfant ; * les sanglots de la mère font notre bonheur et de notre joie.

« À nous le plaisir, à nous les douceurs de l’ivresse ! Que le nectar coule dans nos coupes argentées ! »

Et l’amphore versait des flots d’un breuvage délicieux ; * et l’encens répandait une odeur des plus suaves.


II


Cependant, loin du tumulte et du bruit, * au fond d’un noir cachot était le malheureux exilé.

Sa tête, affaiblie par la souffrance, * se reposait sur ses mains chargées de fers ;