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Je mets donc le genou gauche en terre, j’étends la main droite sur le petit autel, et je prononce très haut le serment, de tout mon cœur :


À toi, Lucifer, je jure respect, amour, fidélité. À toi, Dieu-Bon, je jure de haïr jusqu’à ma mort le Mal. À toi, Esprit de Vérité, je jure d’abominer toujours le mensonge, l’hypocrisie, la superstition. À toi, Lumière Éternelle, je jure de combattre l’obscurantisme, dans cette lutte sainte, verser jusqu’à la dernière goutte de mon sang. À toi, Génie de la Liberté, je jure de m’employer par tous les moyens, quels qu’ils soient, à anéantir le despotisme des rois et la tyrannie des prêtres. Et maintenant, Lucifer, me voici à jamais ta fille. Je me voue à toi de corps et d’âme, je t’appartiens. Dispose de moi en ce monde, pour la gloire de ton saint nom. Accepte mon pieux hommage. Éclaire chaque jour plus vivement mon esprit, et fortifie mon cœur. Et quand sonnera ma dernière heure terrestre, tu me trouveras dans le calme et souriant à la pensée des folles terreurs inspirées par les imposteurs aux ignorants crédules, prête à entrer dans ton Ciel de Feu, séjour de la félicité sans fin, où les flammes divines vivifient et régénèrent. Ainsi soit-il.


Un tonnerre d’applaudissements salua mon Amen final.

Mais grande fut ma surprise en constatant que Mlle Walder ne répandait aucun liquide sur ma tête ; cependant, elle était toujours là, debout devant moi, tenant à la main son calice.

Le F▽ B*** me fit signe de me lever. J’obéis.

Sophia se rapprocha alors.

— Très Aimable et Parfaite Sœur, me dit-elle, le Très Puissant Commandeur Grand-Maître va vous consacrer Maîtresse Templière. Mais auparavant vous avez à accomplir un acte agréable à notre Dieu… Lorsque le traître Jésus déserta la cause de son père céleste et conclut sur le Mont-Thabor un pacte criminel avec Adonaï, celui-ci lui communiqua, — du moins Jésus s’en vanta-t-il, — le prétendu don des miracles. Pour nous, nous ne croyons qu’à ce que nous voyons, et notre raison se refuse à admettre que Jésus ait eu, même en récompense de sa trahison, le pouvoir de bouleverser l’ordre naturel des choses. Or, les prêtres affirment que leur Christ a, par un phénomène merveilleux, permis qu’à leur volonté ce pain (je vis alors qu’une hostie était