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Chicoutimi (Canada), qui a assisté au Congrès et à qui j’ai eu l’occasion de parler à Rome, est entièrement avec nous. Il m’a assuré avoir vu Mgr Baumgarten, le soir du 29 septembre, à la suite de la séance ; Mgr Baumgarten lui a dit qu’il regrettait ce qui s’était passé et surtout ce qu’il avait dit dans cette séance. Voilà une confession précieuse et surtout significative ; vous pouvez publier cela sans crainte, car Mgr l’Évêque de Chicoutimi n’est pas un menteur ! »

Sur la question de l’acte de naissance, j’avais déjà répondu à mes amis. Il y a fort peu de temps que les citoyens des États-Unis se soucient d’avoir des registres d’état civil, et encore en un grand nombre d’endroits on n’en est pas là. Du temps de mon père, le Kentucky brillait au premier rang par sa négligence ; il savait, par tradition de famille, son lieu et sa date de naissance, voilà tout. Se conformant aux habitudes de son pays, il ne me déclara pas, quand je naquis. Ceci peut paraître extraordinaire, incroyable, aux Français ; c’est ainsi, pourtant. Pour suppléer aux actes de naissance, quand on en a besoin, l’usage est de se présenter chez un solicitor ; on lui déclare qu’on est Un-Tel, né tel jour en telle ville, enfant d’Un-Tel et d’Une-Telle ; on affirme, et la plupart du temps on ne vous demande même pas le serment ; on paie au solicitor ses honoraires, il dresse l’acte de déclaration, l’enregistre, le délivre, et c’est cet acte qui fait foi. Voilà ce que j’avais écrit à mes amis, et j’ajoutai : « Vous pouvez vous renseigner chez le consul général des États-Unis à Paris ; il vous dira que c’est ainsi. » Si j’étais une aventurière, il ne m’en coûterait donc pas de m’être munie non pas d’un, mais de dix certificats de naissance ; et chacun différent, si j’en avais eu la fantaisie. Je n’aurais donc rien prouvé, même avec un acte sincère.

Le R. P. Octave, répondant à Mgr Baumgarten, donna cette explication ; elle fit sourire le porte-parole des négateurs allemands.

M. Tardivel, directeur de la Vérité, de Québec, et président de la IIe Section du Congrès de Trente, assura que rien n’était plus vrai que ce que j’avais dit. Le bon Dieu vint à mon aide par lui ; il est du Kentucky, comme ma famille paternelle. Et voici ce qu’il a publié dans son journal, en relatant cet incident :


« Elle est née à Paris, d’un père américain et d’une mère française. Sa naissance a peut-être été inscrite au consulat américain, peut-être aussi ne l’a-t-elle pas été du tout : car on sait avec quelle négligence ces choses se font ou du moins se faisaient autrefois aux États-Unis. Ainsi, à titre d’exemple, je sais, pour ma part, par tradition, que je suis né à Covington, dans l’état du Kentucky, le 2 septembre 1851 ; mais s’il plaisait à quelqu’un de nier mon existence, je ne pourrais pas l’établir par un extrait quelconque des registres soit de l’état-civil, soit de la paroisse catholique de Covington. Des recherches que j’ai fait faire il y a quelques années n’ont abouti à aucun résultat. Voilà ce qui m’est arrivé, à moi, né de parents catholiques, baptisé dans une paroisse catholique régulièrement constituée. Et parce que Miss Vaughan, née d’un père américain et luciférien et d’une mère française et protestante, qui probablement n’étaient que de passage à Paris (car la famille paraît avoir vécu surtout prés de Louisville, Kentucky), parce que, dis-je, Miss Vaughan, née dans de telles circonstances, ne peut pas produire un acte de naissance en bonne et due forme, on ne voudrait pas admettre son existence ? C’est par trop puéril. Je dis on' ; c’est l’abbé allemand (Mgr Baumgarten) que j’aurais dû dire, car il m’a paru seul de son avis. On discute encore l’'œuvre de Miss Vaughan ;