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écloses que j’avais respiré si agréablement, dans les airs, la première fois qu’il me porta là-haut en ses bras.

Aujourd’hui, que dois-je penser de tout ceci ?… Je suis bien certaine de n’avoir été en proie à aucune hallucination. Comme état de santé, nul rapprochement n’est à faire entre moi et ces femmes maladives, qui servent de sujet d’expérience aux médecins matérialistes, et dont le parfait type est cette Rosa, de la Salpêtrière, si bien étudiée par le docteur Bataille, à la suite d’un éminent théologien (M. l’abbé Méric). Je suis, intellectuellement et physiquement, tout le contraire de Rosa et des autres. Or, j’affirme avoir vu, et en vérité j’ai vu.

Au temps de mon erreur, j’attribuais à quelque maléakh l’accident de Paragram ; quant à l’attaque des négroes, je ne la supposais pas œuvre directe d’Adonaï. Mais, lorsque le daimon, qui deux fois s’était montré mon sauveur, me fit connaître son nom et sa nature, je n’eus aucune hésitation à le croire. Depuis lors, en ces derniers temps, un ecclésiastique m’a émis l’opinion que les négroes étaient peut-être des diables, ayant joué leur rôle dans l’infernale comédie, de même qu’un diable avait pu fort bien s’insinuer en Paragram et le rendre emporté, le tout afin de donner à mon soi-disant protecteur surnaturel le moyen, ou, pour mieux dire, le prétexte de me rendre un de ces services qu’on ne saurait payer par trop de reconnaissance. Cet ecclésiastique est-il dans le vrai, en son hypothèse ? ou bien attaque des négroes et emportement de Paragram ont-ils été faits naturels ? Je ne sais ; en tout cas, peu importe. Toute la question est : l’intervention du diable, me guettant et provoquant à la fois mon admiration et ma gratitude par ma mise hors de péril en de telles circonstances.

Il est indéniable qu’au point où j’en étais alors de mon éducation, je devais fatalement garder une impression définitive, ineffaçable, de ces deux événements extranaturels où j’avais été instrument passif. Ce fut alors, en effet, que mon père et mon oncle s’appliquèrent le plus à me faire ressortir tout le merveilleux, tout le magisme qui éclate dans l’existence de Thomas Vaughan. Avant seize ans, j’avais été préparée autant qu’il fut possible ; à partir de 1880 jusqu’en 1883, je reçus le complément de l’instruction luciférienne ; l’Apadno et les autres infernaux livres furent mis entre mes mains et expliqués.

Des écrivains, aux États-Unis comme en Europe, en publiant des informations sur moi, au cours de ces dernières années, ont imprimé les dates de mon entrée et de mon avancement dans la Maçonnerie officielle, et ils se sont étonnés de la rapidité de ma marche ascendante.

Cette rapidité n’a rien de surprenant, si l’on considère mon éduca-