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dant tout, un des Frères ultionnistes, pris sans doute de compassion, essaya de la sauver.

Il proposa, timidement, de mettre une dernière fois l’institutrice en demeure de transpercer d’un coup de poignard l’hostie consacrée.

— Elle a pu réfléchir depuis hier, dit-il, et peut-être est-elle revenue à de bons sentiments.

Mais l’apostat polonais s’opposa vivement à une nouvelle épreuve.

— Non, non ! s’écria-t-il. Elle s’est condamnée hier ; c’est définitif… C’est la peur de la mort qui seule lui ferait commettre ce qu’elle considère comme un sacrilège. Une fois hors d’ici, elle le regretterait ; elle irait trouver un prêtre d’Adonaï, se confesserait, obtiendrait l’absolution et ne reviendrait plus parmi nous. Plus que jamais elle serait notre ennemie. Ne la laissons pas échapper, et exécutons-la sans sursis, sans rémission !

Alors, il exposa son idée, soulignant son explication d’un rire féroce. Cet homme exerçait sur ses complices une véritable terreur ; aucun n’osa élever la voix contre lui, de crainte de se désigner à son implacable haine. Il demanda le vote à mains levées, et toutes les mains se levèrent.

Quel crime !… Voici ce que les neuf ultionnistes avaient voté :

Autour du corps de la victime, déjà lié par les cordes, on enroula les tuyaux de plomb, que l’apostat avait fait apporter. Puis, on descendit la victime dans une cave, aux murs épais ; cette cave, ainsi que les autres de l’immeuble, n’était pas utilisée, parce que la vieille maison, soit à cause de sa vétusté, soit à cause du voisinage d’un égoût, avait son sous-sol infesté par les rats, et ni les pièges ni les appâts empoisonnés n’avaient pu la débarrasser de ces mauvaises bêtes, de taille à lutter contre les chats.

En pâture aux rats, aux gros rats d’égoût, livrée vivante, tel fut le sort de cette malheureuse Sœur palladiste qui n’avait pas voulu poignarder l’hostie sainte !… On comprend, sans qu’il soit besoin de les décrite, quelles furent les horreurs de cette affreuse mort.

Et le souvenir de cet exécrable forfait m’a poursuivie souvent ; et j’y ai songé encore depuis le dernier jour de ma neuvaine ; et mon amour pour Dieu redouble, et ma haine redouble pour Satan.

Ah ! combien je suis heureuse d’avoir été éclairée, en cette nuit bénie du 20 au 21 août !… La douleur que j’éprouvais auparavant à la pensée de nouveaux supplices infligés à Jésus par les sacrilèges sectaires était devenue un tourment intolérable. Maintenant, je ne l’ai plus, le cruel doute. Je gémis sur les criminelles intentions des sacrilèges,