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« Les juifs de tous les pays sentent d’instinct la connexion intime qui existe entre eux et la Révolution française. Ils saisissent les relations intérieures qui lient l’idée d’un Dieu immuable, comme idéal de justice, avec la Révolution de 89 : réveil qui, quoi qu’en disent les ignares, les cafards et les cuistres, devait logiquement aboutir à l’Être suprême de Robespierre… Le juif est démocrate-égalitaire de naissance. »

Voilà donc Robespierre, le seul héritier légitime de Moïse, et le résurrecteur du Mosaïsme. C’est à cette énormité qu’aboutit tout le système biblique de Weill, et la grande découverte qu’il prône dans tous ses livres. Il fallait, en effet, trouver un système qui permit d’éliminer du Pentateuque tout ce qui s’opposait à une pareille conclusion : or, rien n’est plus facile ; tout ce qui, dans le Pentateuque, contrariera cette thèse, il n’y a qu’à l’enlever à Moïse, et à l’attribuer au légiste Esdras, qui a substitué à l’histoire, à la théologie et au code mosaïques, une histoire, une théologie et un code de sa façon, où le vrai Mosaïsme est noyé et presque imperceptible. De tout le Mosaïsme, il ne reste, aux yeux de Weill, que l’idée du Dieu-Un, immuable dans ses volontés et ses décrets, étranger à toute repentance, à toute grâce, à tout pardon. Le Dieu bon et miséricordieux, le Dieu de la grâce et de la rédemption, qui est devenu le Dieu des chrétiens, est une pure invention d’Esdras.

Le Talmud et l’Évangile, selon lui, professent absolument la même religion, avec les mêmes principes de foi idolâtre et liberticide, avec la seule distinction de Jésus à la place du Jehovah d’Esdras.

Jésus-Christ, en adoptant ce Dieu, a adopté avec lui toutes les erreurs monstrueuses qui sont la suite de cette conception, miracles, pardon et révélation : « la Christlologie est l’absurde greffé sur l’absurde[1]. »

Voilà, en deux mots, le système développé par Alexandre Weill dans vingt publications[2], qui ont eu sur l’esprit des juifs émancipés une plus grande influence qu’il ne veut lui-même le reconnaître, et qui ont été accueillies avec la plus grande faveur par la presse maçonnique. On voit avec quelle facilité chaque juif peut à l’imitation de Weill, tout en se disant juif et disciple de Moïse, éliminer des livres saints tout ce qui peut contrarier ses idées ou ses passions : c’est l’esprit de libre examen substitué à la foi, l’homme se mettant à la place de Dieu.

  1. « Ayant quitté l’Allemagne, dit-il lui-même, pour rentrer dans ma patrie natale, afin de n’être pas forcé de me convertir à une religion encore plus fausse et plus ouvertement idolâtre que celle d’Esra (Esdras) d’où elle est pourtant sortie ; forcé de me créer de nouvelles ressources pour sustenter ma misérable vie matérielle, je me lançai dans le tourbillon littéraire et politique de Paris, sans jamais abandonner l’idée, qui m’a poursuivi dès ma jeunesse, de séparer la religion antirationnelle, miraculaire et étroitement nationale d’Esra et de son école, de la religion rationnellement universelle de Moïse, conforme au génie et à la raison de tous les grands penseurs de l’humanité. »
  2. Moïse et le Talmud, Moïse, Le Talmud et l’Évangile, le Nouveau Sinaï, le Pentateuque selon Moïse et selon Esra, Vie de Moïse, Cris d’alarmes. Épitre aux Juifs, le Centenaire de l’Émancipation des Juifs, et autres factums du F∴ Alexandre Weill.