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Eh bien, l’Ode triomphale est un poème essentiellement maçonnique. C’est évidemment pour cela qu’il a eu les honneurs de l’Exposition, où les francs-maçons du gouvernement français, le F∴ Floquet en tête, enrôlèrent, pour le chanter solennellement, je ne sais plus combien de milliers d’orphéonistes. Rappelez-vous les sommes fantastiques dépensées pour l’exécution de cette ode ; comme toujours, les frères trois-points mettaient leur propagande au compte des contribuables ; les maçons glorifiaient leur doctrine, aux frais des profanes.

L’ode débute par une glorification du Soleil, qui est exactement dans la note de la fameuse messe blanche des Palladistes, ou Messe au Soleil. Dans la doctrine de la parfaite initiation, le soleil est en quelque sorte divinisé, et la parodie de la messe catholique se fait par la glorification du soleil, à qui l’on offre le pain et le vin ; l’épi de blé et la grappe de raisin sont, dit-on, la chair et le sang du Dieu-Nature, de Lucifer Dieu-Bon, nourrissant l’Humanité, sa fille par Ève, depuis l’acte saint du jardin d’Éden. Au moment de l’élévation, à la messe blanche palladiste, l’assistance pousse trois fois le cri des bacchanales païennes : Evohé !

Ecoutons les vers de Mlle  Augusta Holmès :


Les Vignerons
(entrant chargés de grappes de raisin)


Evohé ! Evohé ! Evohé !… Soleil, évohé !
    La vigne a fleuri !
    La grappe a mûri !
Dans les cuves le vin bouillonne !
    Ce soir, vignerons,
    Nous reposerons ;
Car le vin rougeoie et rayonne !
    C’est le vin joyeux !
    Le vin des aïeux,
Qui rend la vie et l’espérance !
C’est le vin pur et glorieux !
    C’est le vin de France !


Les Moissonneurs
(entrant chargés de serbes de blé)


Evohé ! Evohé ! Evohé !… Soleil, évohé !
    Le baiser vermeil
    De l’ardent soleil
A gonflé les épis superbes !
    Et toujours encor
    En lourds monceaux d’or
S’entasse la gloire des gerbes !
    Ô Soleil, évohé !