Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 1.djvu/426

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ne peuvent-ils pas venir en visiteurs, ayant l’entrée de droit, plus d’une fois au cours d’une année, dans un autre atelier que le leur ; s’ils désirent revenir une deuxième et une troisième fois, il faut que leur demande d’entrée soit accueillie favorablement par l’unanimité des sœurs présentes à la tenue.

D’autre part, il n’y a que les sœurs ayant le grade de Sublime Écossaise (5e degré du Rite d’Adoption) ou le plus haut grade d’un autre rite féminin, qui peuvent se présenter en visitrices à un autre atelier androgyne que le leur ; quant à elles, le nombre de fois où elles ont droit à l’entrée n’est pas limité, mais elles doivent payer chaque fois à l’atelier qu’elles visitent un droit d’entrée, lequel est au profit exclusif de l’annexe. Du reste, le budget de l’atelier-souche et celui de l’atelier-annexe sont toujours distincts. Il n’y a dispense de droit d’entrée que si la Sublime Écossaise visitrice se présente par ordre, en vertu d’une patente d’inspection à elle délivrée par le pouvoir central. Le droit d’entrée varie, non selon les rites, mais suivant les pays : il est de 20 francs en France ; 2 livres sterlings, en Angleterre ; 10 dollars en Amérique ; 8 marcks seulement, en Allemagne.

Dans leur propre atelier, les sœurs (du moins dans la plupart des pays) n’ont rien à payer, et toutes les charges de l’annexe doivent être supportées par les frères ; mais, quoique n’y étant point obligées, celles des sœurs qui ont quelque fortune contribuent volontiers aux frais généraux, sans compter qu’à la collecte qui est faite à la fin de chaque tenue les pièces d’or ou d’argent ramassées par la sœur élémosinaire doivent provenir des sœurs plutôt que des frères. Il n’est pas téméraire de le supposer ; car une collecte en loge masculine ne rapporte généralement pas grand’chose.

Une Sublime Écossaise visitrice n’est tenue de faire connaître son véritable nom qu’à la grande-maitresse de l’atelier où elle se présente ; pour tous les autres membres, elle garde le double-nom maçonnique qu’elle a adopté. Au 5e degré de l’Adoption, l’initiée ajoute un second pseudonyme à celui qu’elle a pris ou qui lui a été donné au grade de Maitresse.

Ces pseudonymes maçonniques, étant donné surtout que les ateliers androgynes ne s’affilient pas les uns aux autres, assurent le secret d’une façon presque absolue. Dans leur correspondance entre elles, les sœurs maçonnes ne signent et ne parlent d’elles que sous leur nom de loge, en général ; une lettre égarée n’apprendra rien au profane qui la trouvera. Un de mes abonnés me montrait naguère une épître des plus curieuses, où il était question d’une certaine sur Isis, dont une amie racontait les exploits galants à une autre amie. Ce pseudonyme est un de ceux le plus à la mode dans la maçonnerie féminine. Comment voulez-vous deviner de qui il s’agit ? il y a peut-être trente ou quarante sœurs Isis dans les ateliers androgynes de Paris. Toutefois, deux sœurs ne peuvent pas prendre le même pseudonyme dans la même loge.