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câlineries ; on lui fait oublier le misérable qui l’a trompée, au lieu de le rechercher et de lui faire comprendre son devoir de réparation, ainsi que le veut la morale chrétienne. Bref, on vient en aide pécuniairement à la jeune fille, mais en ne laissant jamais échapper une occasion de se moquer devant elle de la religion, des prêtres, des plus saintes croyances. Quand elle est mûre pour l’initiation, on lui propose de la faire entrer dans la société dont ces dames sont membres ; on continuera à lui être utile, et elle verra en même temps qu’on ne s’ennuie pas aux réunions de cette aimable compagnie.

La seconde catégorie de femmes aptes à devenir maçonnes et que les frères, tout particulièrement, s’acharnent à découvrir dans les grandes villes, est beaucoup moins nombreuse que la précédente. Dans toute société qui tend à s’éloigner de la religion, l’adultère étend chaque jour de plus en plus ses ravages, et des gens du monde mariés, bourgeois, négociants, grands industriels, en un mot des hommes jouissant d’une certaine fortune, ont, plus ou moins secrètement, une seconde femme attitrée, une compagne illégitime. La maçonnerie recherche avec soin ces créatures, qui, au fond, n’aiment pas l’homme coupable trahissant pour elles la foi conjugale, et qui, voyant quand même une rivale détestée dans l’épouse légitime, sont à leur tour conquête facile ; par une sorte de dépit. Celles d’entre elles qui, à raison de la situation fausse de leur protecteur, sont libres de leurs actions et de leur temps, constituent une proie qui se livre comme d’elle-même aux griffes de la secte.

Ajoutez à cela quelques filles de théâtre, et vous aurez à peu près tous les éléments du personnel féminin des loges androgynes.

En résumé, la maçonnerie s’applique à avoir à elle des femmes libres ou décidées à le devenir, épouses adultères prêtes au divorce, mais nullement des courtisanes par état ; il est nécessaire que les sœurs maçonnes aient une situation extérieure à sauvegarder, et c’est là ce qui assure le secret, une fois la chute accomplie dans cette galanterie clandestine. La communauté de la faute lie ces femmes entre elles plus étroitement que tous les serments de discrétion, en même temps que l’excitation réciproque, qui est fatale en ces réunions à l’abri des regards des non-initiés, les provoque à faire une surenchère d’impudeur. C’est contagieux, et c’est vraiment une contagion infernale.

D’autre part, ces malheureuses sont tenues, en outre, quand le cas s’en présente, par des secrets en dehors même de celui de leur avilissement en loge. Ainsi, aux États-Unis, on les tient, avant de les amener à l’initiation, soit par des sages-femmes affiliées, soit par des médecins maçons. Le dernier degré du recrutement, ce qui dépasse tout ce qu’on peut imaginer d’ignoble en fait de pression exercée sur une femme qui a commis une faute, ce qui