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esprits cette idée que la souveraineté réside dans le peuple, et qu’elle est une et indivisible, imprescriptible et inaliénable ; mais, étant donné que nos nationaux ne sont pas encore mûrs pour la République, que c’est en dirigeant les conseils de la Monarchie que nous parviendrons à détruire l’influence cléricale et à anéantir la superstition elle-même, et que c’est là le suprême objectif de tous nos efforts, nos conférenciers, sans prêcher aucunement le renversement de la Maison de Savoie dont nous n’avons pas à nous plaindre, devront simplement poser la question politique en ces termes à leurs auditeurs : « Le statut est éminemment respectable, lorsque le peuple l’accepte librement ; il forme un contrat entre le peuple et l’autorité, sous la condition naturelle que le peuple peut toujours, lorsqu’il ne répond plus à son sentiment et à ses besoins d’expansion libérale, le revoir et le réformer par les moyens légaux. La constitution actuelle de l’Etat est donc susceptible de constante amélioration, et elle sera loyalement respectée par tous les bons citoyens, tant que la Maison de Savoie sera en communion d’idée avec le peuple ; mais un principe de droit humain domine tout, c’est celui qui dit qu’une génération ne peut assujettir à ses lois les générations futures. »

« Tel est le memorandum, qui servira de guide à tous nos conférenciers dans l’œuvre de propagande créée maçonniquement par la fondation des cercles populaires anticléricaux d’Italie. »

On peut dire que cette circulaire de Lemmi contient, mieux que toute autre, le plan de déchristianisation des peuples catholiques. Elle méritait donc d’être publiée ; car elle montre la tactique que j’ai dénoncée et fait voir comment les décisions du Congrès de Milan ont été mises à exécution.

Sauf les réserves de Lemmi au sujet de la politique de la maçonnerie vis-à-vis de la Maison de Savoie, il est évident que ce plan de campagne s’applique à toutes les nations où le catholicisme est pratiqué, sinon honoré comme religion de l’État.

En Autriche-Hongrie, en Bavière, en Belgique, en Espagne, en Portugal, les instructions du chef de la secte internationale sont suivies par les arrière-loges tout aussi bien qu’en Italie, et, soit sous le nom de cercles populaires, soit sous ceux de sociétés de tout genre, même de gymnastique, les francs-maçons travaillent avec activité à déchristianiser le peuple.

Dès qu’une association quelconque se fonde, aussi bien avec un programme d’études que pour un motif de délassement, si vous ne voyez pas dans son règlement une part faite à la religion, si les directeurs de cette société ne s’adjoignent pas un aumônier, — c’est là la pierre de touche, — c’est que cette association, ce cercle, ce groupe, reçoit, le sachant ou l’ignorant, son inspiration de la franc-maçonnerie.

En France, la secte a déjà obtenu beaucoup plus de résultats qu’en Italie ; mais, chez nous, l’œuvre de mal est commencée politiquement depuis plus longtemps.