Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 1.djvu/365

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mauvais principes, destructeurs de la liberté si chèrement acquise par le sang des martyrs du droit humain, et fausser ainsi les esprits de leurs concitoyens ; une loi qui permettrait une si pernicieuse licence préparerait le retour de la tyrannie et ne serait donc pas la loi d’une société libre. Les législateurs qui la voteraient seraient d’avance les complices des antilibertaires et les restaurateurs de la superstition, pendant tant de siècles seule cause des maux de l’humanité. Aussi une telle loi est impossible, — sans valeur, si elle venait à être édictée ; — et la seule liberté vraie, en matière de propagande des opinions, est celle qui, d’accord avec la raison, a pour base cet axiome : « Liberté du bien, répression du mal. »

« Dans le même sentiment, le droit de s’assembler paisiblement ne peut être interdit aux citoyens. Egalement, le droit d’association est fondamental dans une société libre, sauf le cas où des individus associés poursuivraient un but contraire aux intérêts de la société elle-même, c’est-à-dire aux intérêts de l’ensemble des hommes constituant le corps social.

« Par sûreté, il faut entendre la protection accordée par la société à chacun de ses membres pour la conservation de sa personne, de ses droits et des biens qui lui sont propres.

« Quand nous aurons constitué la société vraiment libre, il sera prudent néanmoins de nous tenir en garde contre le rétablissement de la tyrannie ; car il est des natures perverses qui éprouvent le besoin d’asservir la multitude en se plaçant au-dessus d’elle en caste privilégiée. Ces mauvais citoyens recourront à l’hypocrisie, lorsqu’ils verront l’impossibilité de renverser par la violence notre édifice social. Il faut donc prévoir même le cas où, à force d’astuce et trompant le peuple, ils parviendraient, en simulant la vertu, à avoir la majorité dans les emplois publics, à devenir les gouvernants.

« Pour écarter tout péril résultant de cette situation, il est indispensable que, par la loi établie lors de l’avènement de la liberté et de l’égalité, ceux qui gouvernent soient à jamais dans l’impossibilité d’opprimer le peuple ; c’est la loi elle-même qui, au moyen de mesures sagement prévues, doit protéger la liberté publique individuelle contre l’oppression possible des gouvernants. Aussi, nul ne doit être accusé, arrêté ni détenu, que dans les cas déterminés par la loi et selon les formes qu’elle a prescrites.

« Tant que le gouvernement se trouve entre les mains d’hommes justes, ces formes seront nécessairement respectées ; c’est pourquoi le citoyen, régulièrement accusé d’un délit ou d’un crime, et quelque innocent qu’il puisse être, doit se soumettre à la loi justement invoquée pour l’appeler où le saisir ; sa résistance serait une grave faute et aggraverait son cas.

« Mais, si les gouvernants sont des hypocrites ayant surpris la confiance du peuple, ils exerceront leur autorité par des actes en violation de la loi ;