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confectionner son sortilège, des livres de magie qu’il avait rencontrés dans ses voyages, spécialement à Tolède et à Cordoue. Il y avait, en effet, à Tolède, à cette époque, une école occulte de magie et de nécromancie.

Dans certains cas, le diable se contentait de procédés beaucoup plus simples et plus accessibles à tous. D’après Paracelse, un vrai magicien qui s’y connaissait, il suffit de peindre sur un mur une image à la ressemblance d’un homme, pour que tous les coups et blessures qu’on portera à cette image soient reçus et ressentis par celui dont l’image est la ressemblance.

Un crapaud peut aussi remplacer le Volt, à condition qu’on lui donne le nom de celui qu’on désire envoûter, et qu’on observe les cérémonies imprécatoires. Une autre recette recommande de lier le crapaud vivant avec des cheveux qu’on s’est procurés d’avance ; puis, après avoir craché sur le crapaud, on l’enterre sur le seuil de son ennemi ou en tout autre endroit qu’il fréquente tous les jours par nécessité. Ce dernier procédé est encore en usage dans l’Amérique du Sud, ainsi qu’en Espagne.

Du reste, l’envoûtement existe de nos jours. « On m’a rapporté confidentiellement, dit le colonel Albert de Rochas, avec les noms et les détails les plus précis, un drame qui se serait passé, il y a une dizaine d’années, dans une famille considérable de Toulouse, où une dame serait morte subitement d’une prétendue péritonite au moment où une nécromancienne de la ville piquait au ventre une statuette de cire qui était censée la représenter… J’ai reçu un certain nombre de lettres provenant de personnes qui se croyaient envoûtées et me demandaient mon appui contre leurs persécuteurs. J’ai vu à Montmartre une femme qui fait profession de repousser les envoûtements à l’aide de prières. »

Un ouvrage comme celui-ci est donc de pleine actualité, et il est vraiment nécessaire de rappeler les pratiques anciennes en matière de magie, puisqu’elles n’ont pas été abandonnées ; quelques-unes ont pu être modifiées plus ou moins, mais le fond de la sorcellerie est toujours le même.

Oui, ce sont les pires horreurs du moyen-âge qui revivent en notre siècle ; et plus nous approchons du vingtième, plus le satanisme accentue son œuvre souterraine, plus il multiplie ses modes d’action.

J’ai déjà fait allusion (1er volume, pages 434-435) à l’étrange bataille, à coups d’envoûtement, entre Albert Pike et le docteur Gorgas, médecin de l’Université de Baltimore, chef d’un rite écossais dissident (le Rite Cernéau).

Le réformateur du Palladisme envoûtait à sa manière, le plus souvent en se servant d’une poupée de cire. Il se procurait, à défaut de cheveux ou de rognures d’ongles, une parcelle quelconque de vêtement porté par son ennemi ; dans sa lutte contre Gorgas, il était parvenu à avoir, de la blanchisseuse du docteur, un mouchoir de celui-ci.

Il faisait, d’abord, tremper cette étoffe dans un bain d’eau fortement salée,