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Miroir magique

« J’ai tracé sur le parquet un disque avec du charbon ; ce signe n’a aucune vertu par lui-même, mais il en acquiert une fort grande, lorsqu’il est tracé dans certaine disposition d’esprit (en d’autres termes : lorsqu’il représente un pacte implicite avec le diable). Lorsque le signe magique a en puissance la propriété que vous y avez imprimée, vous n’avez plus besoin d’autre préparation. Couvrez-le jusqu’à ce que vous soyez en mesure de commencer l’expérience… N’ayez point l’intention d’agir par vous-même, cela nuirait à l’expérience et en dénaturerait les résultats. »

Du Potet savait très bien que dans tous les prodiges qui s’opéraient par lui, il n’était que l’instrument passif d’une puissance étrangère et supérieure à lui, puissance dont les effets l’étonnaient et l’effrayaient lui-même. Aussi se contente-t-il de donner des instructions sur les précautions à prendre pour prévenir les accidents terribles qui pourraient surgir de ces formidables expériences. « Préparez-vous seulement, dit-il, aux éventualités d’accidents nombreux, dont plusieurs sont à redouter. Soyez vif et prompt dans les déterminations que vous aurez à prendre, car les émotions qu’éprouvent les expérimentés font déborder leur sensibilité, et il faut que vous arriviez à temps pour les saisir et les transporter loin du signe magique… Ayez un siège bas et sans dossier, car souvent le voyant cherche à s’approcher très près du signe ; il se penche et finit par se précipiter à terre. Ayez encore un couvercle opaque pour couvrir instantanément le signe en cas de besoin ; car souvent les émotions sont si grandes, les frayeurs si terribles, que si vous ne dérobez pas à la vue l’endroit d’où partent et se montrent les images, il vous sera presque impossible de conserver votre empire sur le sujet… Ce que l’on voit dépasse de bien loin ce qui se montre dans les affections nerveuses, soit qu’elles proviennent d’une altération du cerveau ou d’un dérangement dans les fonctions de la vie organique… Moi-même, en cet instant, en livrant au public cette ébauche de science antique, qui jamais ne sortit en vain du temple, sais-je bien ce que je fais, ce qui m’attend ?… »

premier fait

« Toutes précautions prises, vous laissez aller les choses. Le voyant perd bientôt la conscience de son être ; le regard sans cesse tourné vers le centre magique, il tourbillonne emporté, soulevé par des forces inconnues, et la lumière des immortels vient pénétrer son âme… L’instant va venir où, comme la Pythie, le voyant rendra ses oracles. Il voit, mais nul ne sait encore ce qu’il aperçoit. Il pleure, car sa mère est apparue… D’abord, il n’a vu que sa face ; puis, successivement elle s’élève devant lui ; il veut sentir ses étreintes, entendre sa voix. L’ombre sourit et semble l’inviter du regard et