Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 1.djvu/21

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’avenir, c’est pour y puiser une inspiration, et souvent Dieu répond à cette prière du croyant, en lui faisant ouvrir le bon livre juste à l’endroit qui s’applique à son cas.

Les gens superstitieux, au contraire, se font un jeu de chercher, en ouvrant au hasard même un livre saint qu’ils profanent ainsi, quelle ligne sur laquelle tombera leur regard pourra leur apprendre une chose future. Telle est la cléromancie. Cependant, il est juste de dire que les mages du xixe siècle s’y livrent surtout à titre de passe-temps ; ils réservent toutes leurs forces et tout leur enthousiasme pour des choses plus diaboliques, l’astrologie, par exemple, et la cabale.


A. — CHIROMANCIE


De tous les procédés divinatoires dus au charlatanisme inspiré consciemment ou inconsciemment par le démon, ceux qui ont eu le plus de persistance et de vogue dans les temps modernes, sont à coup sûr les procédés qui ont pour objet l’examen du corps de l’homme, afin d’en tirer d’abord des inductions, très hasardées, ceci soit dit avant tout, sur les qualités ou défauts, les passions ou les habitudes de l’âme, pour aller de là jusqu’à la divination et à la prétendue prédiction des faits à venir. De tout temps, l’homme a cherché à lire les caractères invisibles de l’âme sur le visage, sur la physionomie humaine, et de là sont nées ces sciences d’observation, plus ou moins conjecturales, qui ont passionné à certaines époques la curiosité publique sous les noms de physiognomonie, de phrénologie, de cranioscopie. D’après saint Jérôme, « le visage est le miroir de l’âme, et les yeux, en gardant le silence, découvrent les secrets de l’esprit. »

Mais le visage est un miroir trop mobile, et dont les images sont dépendantes jusqu’à un certain point de la volonté humaine. Quant à la phrénologie et à la cranioscopie (systèmes de Spurzheim, de Gall et autres analogues), il fut trop facilement démontré par l’expérience qu’il n’y avait au fond de ces merveilleuses théories physiologiques que pure fantaisie, conceptions puériles et absurdes. Restait la main, ce miroir que rien ne peut troubler, disent les sorciers modernes, ce miroir toujours prêt à livrer les secrets cachés dans le dédale de ses lignes ou sous les rugosités plus ou moins apparentes de ses protubérances ; la chiromancie, victorieuse de ses sœurs détrônées, continue à passionner les esprits faibles du vulgaire, les âmes crédules détournées de Dieu par la superstition, dupes toutes prêtes à l’exploitation du premier charlatan venu.

Du reste, la chiromancie a pour elle, à défaut de mérite, un attrait, un prestige auquel les esprits qui se disent indépendants ont peine à se soustraire : l’antiquité. L’art de prédire l’avenir par l’inspection de la main