Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 1.djvu/166

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

découvert celui que je cherchais depuis si longtemps ! » Il allait enfin nager en plein satanisme, voir les statues se mouvoir, les spectres se lever, entendre la foudre retentir dans le temple des dieux.

Cependant, on veut mettre sa foi à l’épreuve ; on essaie de le dégoûter de la magie de Maxime, afin d’exciter son zèle et de lui inspirer le désir d’en savoir davantage. Eusèbe fait l’office de modérateur ; dans ses conférences avec Julien, il insiste à dessein sur la distinction qu’il faut établir entre les vrais prodiges venant des dieux, et les impostures qui fascinent et illusionnent les sens au moyen de la prestidigitation. Mais plus il s’efforce de faire passer Maxime à ses yeux pour un charlatan, plus s’enflamme en Julien le désir de le connaître ; il brûle d’aller à Éphèse rejoindre Maxime.

Que se passa-t-il à Éphèse entre Maxime et Julien ? Nous en savons quelque chose par Théodore et Libanius. Selon le récit de Théodore, Maxime conduisit Julien dans un temple, et là évoqua les démons en sa présence. Après beaucoup de cérémonies et d’invocations, Satan paraît sous des formes épouvantables. Saisi d’effroi, par une réminiscence machinale de ses premières croyances, Julien fit le signe de la croix, et tout disparut. Maxime, alors, le réprimanda vivement d’avoir ainsi troublé la cérémonie : « Ne vous imaginez pas, lui dit-il, que ces esprits appréhendent le signe de la croix, ni que ce soit la figure de ce signe qui les ait chassés d’ici ; c’est qu’ils ont détesté votre action, et ils se sont retirés pour témoigner l’horreur qu’ils en éprouvaient. »

Julien n’eut pas de peine à être convaincu, et cette expérience acheva de le confirmer dans son apostasie.

« Dès lors, dit Libanius, Julien brisa, comme un lion furieux, tous les liens qui l’attachaient au christianisme. Il résolu d’effacer de son front les stigmates de son baptême ; ces démons, dont on avait voulu l’affranchir, étaient vraiment les dieux trois fois saints, les dieux immortels. Maxime consacra à Mithras un taureau, symbole du taureau équinoxial que le dieu égorge au printemps et dont il répand sur la terre le sang fécondant. Il supplia l’âne du monde de rejeter sur l’innocente victime la peine que Julien avait encourue en faisant profession d’athéisme (c’est-à-dire de christianisme). Il creusa une fosse en chantant des hymnes au Soleil et en accomplissant les cérémonies d’usage ; puis, Julien descendit dans la fosse sur laquelle Maxime égorgea le taureau. Julien en sortit couvert de sang, mais lavé par ce sang de toutes ses souillures chrétiennes. Dès lors, son projet bien arrêté fut de détruire le christianisme, s’il arrivait jamais au pouvoir. »

Désormais, Julien s’attacha particulièrement à Maxime, qu’il fit le confident de tous ses desseins. Chrysanthe les rejoignit bientôt à Ephèse, et les deux théurges remplirent son esprit de leur science magique sans le rassasier. Non content de leurs enseignements « qui pouvaient à peine, dit Eunape,