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des parties essentielles de la Magie, la « Nécromancie » ou l’art magique d’évoquer les âmes des morts, pour en obtenir la connaissance de l’avenir ou des révélations sur les mystères de l’autre monde. Cet art est tellement essentiel à la Magie, il a été de tout temps un privilège tellement caractéristique de ses adeptes, que la Nécromancie est devenue synonyme de la Magie.

Le respect, la religion des morts est un sentiment des plus chers à l’homme, naturellement désireux de retrouver dans un autre monde les êtres qu’il a aimés ici-bas. C’est ce sentiment naturel et légitime que le démon s’est efforcé d’exploiter à son profit, depuis le jour où il lui a été permis de tendre à l’âme humaine tous les pièges que pouvait lui inspirer sa haine de Dieu et de l’humanité.

Aussi trouvons-nous dans toutes les fausses religions dont il s’est fait le dieu, un ensemble de pratiques et de rites ayant pour but des communications plus ou moins directes avec les Esprits ou âmes des trépassés. C’est donc avec raison que nos magiciens modernes, pour justifier leurs croyances et leurs pratiques nécromanciennes, les font remonter à l’origine même des religions diaboliques qui les ont précédés dans cette voie et dont ils ne font qu’imiter et singer les prétendus prodiges.

La nécromancie moderne n’est qu’une résurrection de toutes les vieilles nécromancies en honneur dans les religions panthéistes de l’Orient, ou dans le paganisme grec ou romain. Il me faudrait un volume pour parcourir toutes les superstitions scélérates ou infâmes que Satan a su inspirer à ses fidèles sous le semblant du culte religieux rendu aux morts, depuis Hermès[1] et Zoroastre jusqu’aux magiciens ou aux sorcières qui encombraient Rome sous les premiers empereurs.

Je dois me borner à quelques traits saillants, où se retrouvent, comme dans leur type initial, les théories et les pratiques de la nécromancie contemporaine.

Les batteries du diable sont toujours au fond les mêmes ; seulement il sait les modifier avec un art proprement infernal, pour les adapter aux changements opérés dans les esprits et les mœurs par les progrès de la science et de la civilisation. Ce qu’il essayait d’obtenir dans les rites païens par la crainte et la terreur, il l’essaie aujourd’hui en inspirant à un certain nombre de ses adeptes une religion toute de mansuétude, de bienveillance et de douceur, capable de prendre par le sentiment les âmes tendres et aimantes qu’attirent ces fallacieuses intimités d’outre-tombe, et qui, amorcées par ce

  1. Je rappelle ici qu’Hermès est en réalité un des plus puissants démons, qu’il a vécu sur terre sous forme humaine, ayant réalisé, dans toute la vérité du terme, ce que l’on appelle, pour désigner un homme très méchant : « un diable incarné ».