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Il me reste à citer quelques cas d’hallucinations pour faire bien toucher du doigt la différence énorme qui existe entre l’imaginaire et le réel. Ainsi, l’école matérialiste englobe sous le nom de démonomanie tout ce qui a rapport à l’obsession et à la possession. Or, la démonomanie existe bien, avec son cortège d’illusions sensorielles, d’hallucinations ; mais elle est une maladie et ne se guérit pas avec des exorcismes.

Voici, par exemple, une observation de Dagonet, dont j’ai dit un mot tout à l’heure.

« H*** compte dans sa famille quelques cas d’aliénation mentale. La folie a fait explosion chez lui, une année environ avant son arrivée à Stéphansfeld (asile d’aliénés dont Dagonet était le médecin en chef), à la suite de quelques contrariétés.

« Il affirme être possédé du démon ; celui-ci a pris domicile dans son ventre sous la forme d’un gros serpent. Le malade pousse de temps à autre des cris bizarres ; il s’exprime parfois dans une langue incompréhensible ; c’est alors, dit-il, le diable qui parle par sa bouche. Il s’établit quelquefois entre le démon et lui un véritable dialogue, dans lequel il reproche à son esprit de lui susciter des mauvaises pensées de toutes sortes.

« Il nous supplie souvent de faire venir le bourreau de Strasbourg, pour mettre fin à une existence qu’il ne peut supporter. En vain implore-t-il le secours des ministres de la religion ; aucune consolation du prêtre ne parvient à calmer son délire. »

Nous ne sommes donc pas en présence d’un vrai possédé ; c’est certain.

« Un jour, il dérobe un couteau et se fait au cou une blessure dangereuse, qui heureusement put être guérie au bout de quelques jours. À peine est-il rétabli, qu’il nous reproche vivement de lui avoir sauvé la vie.

« Le délire, cependant, acquiert chaque jour une intensité que rien ne peut arrêter ; il nous prie à chaque instant de lui ouvrir le ventre.

« Malgré la surveillance spéciale dont il est l’objet, il parvient de nouveau à cacher un morceau de fer, dent il se sert pour s’ouvrir le ventre. Il en résulte une plaie pénétrante transversale, à bords irréguliers, d’où sortaient l’épiploon et une grande partie des intestins ; ces derniers furent aussitôt réduits et les lèvres de la plaie mises en contact par quelques points de suture. Malgré les soins qui lui furent prodigués, le malade mourut au bout de trois jours.

« Entre autres altérations remarquables, on trouve à l’autopsie trois vers lombrics ayant plus de vingt centimètres de longueur, contenus dans l’estomac. Ce dernier présente, en outre, deux ulcérations serpigineuses, à fond rougeâtre, de la grandeur environ d’une pièce de deux francs, et dont l’une correspondait à une perforation de la paroi de l’organe.

« La mort, qui a eu lieu d’une manière subite, quand la plaie de l’abdomen