Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 1.djvu/107

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tisme, M. de Caudenberg. Dans un ouvrage où il réfute les assertions de M. de Gasparin (le Monde spirituel), il s’exprime ainsi :

« Non seulement je suis loin d’admettre les hallucinations collectives, mais je les nie formellement, hors dans un seul cas : celui où plusieurs personnes, excitées par un appareil inaccoutumé, par des préparations ou des cérémonies préalables qui frappent l’imagination, sont d’ailleurs toutes prévenues de ce qu’elles doivent voir. Mais il est contre toutes les règles de la vraisemblance que dix ou vingt individus aperçoivent à la fois un objet qui n’existe pas ou entendent un même son qui n’a pas retenti, quand d’ailleurs cette manifestation est absolument inattendue pour eux. Il est contraire à toutes les notions de la probabilité et du jugement qu’un nombre plus ou moins grand de personnes jouissant du plein exercice de leurs facultés se trompent toutes instantanément et d’une manière identique sur un fait de cette nature ! »

Il ne faut pas perdre de vue que dans les paroles que je viens de citer il ne s’agit que des hallucinations naturelles (ceux auxquels s’adresse l’argumentation de M. de Caudenberg n’en reconnaissant pas d’autres), et non de celles que le démon peut produire, et qu’il produit en effet dans l’esprit de ceux qu’il veut égarer à l’aide de ses prestiges ; mais c’est alors une hallucination toute surnaturelle, et dans ce sens on peut dire que certains obsédés, par exemple, ont été des hallucinés.

« C’est alors, dit très bien M. Gougenot des Mousseaux, que parlant à notre âme un langage intérieur, et remuant, excitant, maniant en maîtres les humeurs ou les appareils de nos corps, ces êtres invisibles et subtils nous font voir, entendre et sentir ce qui n’a point de forme, ce qui manque de corps, ce qui n’existe en réalité que dans les impressions dont ils nous affectent, ce qui n’est vrai que subjectivement, c’est-à-dire dans l’image ou dans le fantôme tracés par eux dans notre cerveau. »

J’aurai occasion, dans le chapitre suivant, de revenir plus amplement sur le mode d’action employé par le démon dans ses diverses manifestations, et en particulier dans les évocations d’outre-tombe.

Néanmoins, il est bon de montrer tout de suite, par un exemple, avec quelle désinvolture les adversaires du surnaturel appliquent leur merveilleux système de l’hallucination naturelle aux faits les plus authentiquement certifiés et les plus évidemment dus à une intervention surnaturelle. Cet exemple nous fera toucher du doigt la différence qui existe entre les deux ordres d’hallucinations.

Il est un fait des plus fréquents dans le monde surnaturel, dans la vie des saints, et même dans celle des plus humbles fidèles, fait où éclate dans tout son lustre et sa puissance dramatique l’action simultanée des esprits sur l’âme humaine, je veux dire : le combat qui se livre dans notre âme entre