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sur cet arbre la première feuille de cette petite branche isolée de droite ? Je vais la couper juste à la naissance de son attache. » En effet, le coup partit, la petite feuille tournoya dans l’air et descendit dans l’herbe pour prendre sa place de feuille morte. Nous avons mesuré la distance, elle était de vingt-huit pas, et mon maître me disait : « J’en tirerais dix comme cela à la file… » Soudain, on entendit des voix : « Ce sont ces dames, me dit-il, ramassez tout, je vous prie, et passez un peu cette baguette au papier de verre très fin. »


Étretat, fin juin. — Mon maître avait acheté pour la chasse un chien d’arrêt tout dressé : il vient d’arriver. Cette jolie bête fut tout de suite attachée à son maître, qui, dès le matin, allait la prendre au chenil ; elle ne le quittait plus qu’à l’heure des repas. Monsieur était enchanté de son chien, un superbe épagneul Pont-Audemer, avec une très jolie coiffe, des yeux intelligents ; il ne lui manquait que la parole. Il poussait la perfection jusqu’à ne pas courir après les poules. Aussi mon maître l’aimait-il beaucoup et me disait : « Je crois que ce joli Paff sera un précieux auxiliaire à la chasse. » Plusieurs fois, pendant l’été, le garde vint chercher Paff pour le conduire à la ferme de M. Martin et le promener sur le terrain de la chasse.


Juillet. — M. de Maupassant s’est amusé à tirer quelques feux d’artifice ; mais cette année nous avions eu de très fortes chaleurs qui avaient tout desséché, jusqu’aux joncs marins de la côte, qui avaient changé leur ton vert habituel contre une teinte acajou terni, demi-morts, la tête inclinée vers le sol ; ils étaient tout à fait à point pour flamber, et c’est du reste ce qui se produisit. Plusieurs assistants