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Le lendemain, mon pauvre maître me reçut aussi bien que d’habitude et me demanda si nous irions bientôt chez lui, rue Boccador.

Dans la journée, je signalai au docteur Blanche la scène inquiétante qui avait eu lieu en lui répétant textuellement ce qu’il m’avait dit. À ce récit, les traits de l’aliéniste se contractèrent, devinrent durs ; les sourcils froncés, il prononça : « Tant pis ! c’est ce que je craignais. » Il descendit très vite l’escalier, et il me sembla qu’il serrait bien plus fort que d’habitude la rampe en bois sur laquelle il s’appuyait toujours. Je restai perplexe. Quand je pus rassembler mes impressions, je conclus que le savant désespérait décidément de la santé morale de son illustre client. Alors je pensai : s’il va moins bien, s’il n’y a plus espoir de guérison, pourquoi le laisser ici ? Nous serions bien mieux à la campagne, un homme et moi suffirions à garder le malade, puisqu’il est halluciné, et qu’il n’a jamais la moindre velléité de révolte. L’autre jour, il m’a bien dit de me retirer, mais le lendemain il n’y pensait plus.


16 juin 1892. — Mme de Maupassant est absolument de mon avis, elle désirerait une autre organisation d’existence pour son fils…


15 juillet. — Tout a été fait dans ce sens de la part de la mère de Monsieur et de celle de sa tante, Mme d’Harnois, qui a toujours été pleine de sollicitude pour lui. Mais, à notre grand regret, l’on s’est heurté à l’impossible, le malheureux doit rester enfermé, réduit à l’état de mort vivant !

Le jour où j’appris cette décision, mon maître me reçut par ces paroles : « François, quand irons-nous en-