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mystère qui s’épand à travers les corps, affole les nerfs et les âmes d’une fièvre poétique et matérielle, en mêlant à l’air limpide qu’on respire une onde sonore qu’on écoute. »

Après avoir donné un coup d’œil au palais des Papes, nous franchissons le Rhône et visitons l’ancienne ville de Villeneuve-d’Avignon. Nous rentrons à Avignon, après avoir repassé le fleuve qui coule majestueux et qu’on voit serpenter au loin du haut du pont. Sur une terrasse à gauche, qui domine la place et le palais des Papes, nous apercevons une grande chapelle, Notre-Dame des Doms. Mon maître me dit : « Voyons un peu ; il y a quelquefois dans l’intérieur de ces monuments anciens des choses qui sont à examiner de près, tels que des vitraux, etc… » Après avoir fait le tour de l’église, nous apercevons sur la gauche, près de l’entrée, un hall, et là, dans une châsse en verre, une sainte de grandeur naturelle, qui y est étendue. Monsieur la regarde avec beaucoup d’attention comme toutes les choses qu’il veut approfondir et il dit à haute voix : « Cette statue est l’œuvre d’un artiste italien. En France, nous ne savons pas arriver à un fini aussi artistique. » En sortant, il donne quelque monnaie à la femme qui est préposée à l’eau bénite. Celle-ci lui apprend alors que la jolie sainte Nevia-Félicité qu’il venait d’admirer avait été offerte à cette église par le pape Pie IX.

En revenant vers la gare, Monsieur donne des regards à gauche et à droite dans des rues étroites où l’on aperçoit des façades de monuments gothiques. Le soir, il m’annonce que nous pouvons partir pour Nîmes, et il ajoute : « Ce sera amusant plus tard, quand M. Dumas me demandera où j’ai pris mon visage de femme, et que je lui répondrai : « Dans une châsse à Notre-Dame des