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dans un sentier un peu plus à droite, des coiffes blanches qui se dirigeaient toutes du même côté. Je conclus que dans cette direction devait se trouver quelque chose d’intéressant. Je pris donc le même chemin ; sans en avoir l’air, je suivis un groupe de jeunesses. Après avoir gravi, pendant un moment, un sentier assez large en forme d’escargot, j’arrivai à un massif de pins superbes, de vrais géants. Tout près, sur la gauche, après avoir escaladé un monticule de terre, tout couvert de mousse, je touchai au but du pèlerinage, car c’était un pèlerinage qui attirait ces jeunes filles. Il n’y avait pas de chapelle ni de saint, mais c’était la Grotte d’Artus, un fameux chef breton qui combattit au sixième siècle contre les Anglo-Saxons pour l’indépendance de sa patrie. Plus tard, il devint le héros des romans de chevalerie, dits de la Table ronde et du Saint-Graal.

« Je me plaçai derrière un buisson pour voir ce que venait faire en cette grotte toute cette jeunesse féminine. D’abord, elles entrèrent ou plutôt se glissèrent en courbant très bas la tête sous un tas de pierres, puis elles passèrent par une espèce de grande cheminée pour ressortir sur la plate-forme ou toiture de la grotte, qui était faite de grandes dalles. Une fois en haut, elles se mirent à danser, à rire, à chanter à tue-tête. C’était à qui chanterait le plus fort.

« Le moment de descendre arrivé, il ne leur plut pas sans doute de s’en aller par l’ouverture qu’elles avaient prise pour monter sur le toit de la demeure du grand Artus, car chacune d’elles se laissa glisser à reculons entre deux pierres écartées qui formaient couloir. Cette descente n’alla point sans leur ramener les jupes sur la tête ; elles jetaient alors de drôles de petits cris, car aucune d’elles n’avait de pantalon, de sorte qu’elles